L'UMP a dévoilé mardi le volet économique et social de son programme pour 2012, destiné à alimenter le projet du futur candidat, sans doute Nicolas Sarkozy. Pour ce "rendez-vous du courage" auquel participaient des centaines de militants, le parti majoritaire a proposé de "sortir des 35 heures" en confiant aux partenaires sociaux le soin de négocier, dès 2012, la durée du travail, et ce branche par branche. Sans toutefois remettre en cause la durée légale du travail, comme le réclamaient certains. Mais les entreprises ne sont pas forcément toutes prêtes à faire marche arrière.
"Un foutoir invraisemblable"
Pour certaines d'entre elles, en tout cas, enterrer les 35 heures n'apparaît pas comme la priorité, puisque globalement, tout le monde trouve son compte aujourd'hui avec le système des heures supplémentaires, les salariés qui travaillent plus gagnent plus et les entreprises ont plus de flexibilité.
La défiscalisation qui accompagne les heures supplémentaires a en effet permis à de nombreuses entreprises de trouver un équilibre. Mettre un pied dans la fourmilière des 35 heures ne serait donc pas forcément la bonne solution, comme l’explique au micro d'Europe 1 le secrétaire général de la CGPME (Confédération générale du patronat des petites et moyennes entreprises), Jean-Eudes du Mesnil du Buisson. "Si demain, dans l’ensemble des entreprises, on doit remettre sur la table la question du temps de travail, ça va être un foutoir invraisemblable et un sujet de préoccupation supplémentaire pour les entreprises", met-il en garde.
Car d’après lui, "dans la période actuelle, la priorité n’est pas de remettre en cause l’organisation du temps de travail dans l’entreprise. Les grandes entreprises sont mieux calibrées pour ce genre de discussions. Elles ont des gens qui sont des professionnels de la négociation, des DRH, ce n’est pas le cas de la plupart des PME et des TPE", précise-t-il.
"C'est un sujet dépassé"
Même son de cloche du côté du Medef, la principale organisation d'entreprises françaises. Pour Stephan Brousse, président du Medef Paca, remettre en cause les 35 heures "voudrait dire que toutes les entreprises pourraient avoir aujourd’hui quatre heures supplémentaires à faire, ce qui n’est pas le cas actuellement, car malheureusement toutes les entreprises de tous les secteurs n’ont pas un accroissement d’activités". "L’urgence du moment, estime-t-il, n’est pas celle-là. L’urgence, c’est qu’on aille chercher la croissance avec les dents (…), donc ne nous trompons pas de sujet".
"Si c’est une réforme fondamentale, il faut la faire. Mais aujourd’hui, ni les syndicats de salariés, ni les syndicats patronaux ne la réclament. Je ne comprends pas quel est le besoin urgent d'aller remettre ce sujet sur le tapis, un sujet typiquement polémique, 'has been'. C'est un sujet qui est déjà passé malheureusement", s'insurge Stephan Brousse.
"Revenir sur le nombre de RTT"
Revenir sur les 35 heures séduit peut-être davantage les grandes structures que les petites et moyennes entreprises. Si les discussions sur les renégociations des 35 heures risquent d'être tendues, elles seront indispensables, considère ainsi sur Europe 1 Frédéric Bedin, président de Public système, une entreprise de communication de 500 salariés. "Il faudra bien que l’on travaille tous plus", prévient-il.
Mais ce dernier souhaite toutefois mettre l'accent sur un autre point "dont on ne parle pas souvent : le temps de travail des cadres, le nombre de jours de RTT". "Un cadre, en Allemagne, a 5 ou 6 semaines de vacances. En France, il en a 9, 10, 11, 12. Pour un peu que le cadre soit le directeur commercial qui est chargé de trouver du boulot pour l’usine, évidemment, avec quatre semaines de moins (que les Allemands) on trouve moins de clients", regrette-t-il. Pour cet entrepreneur, pas de doute : "il faut donc revenir aussi sur le nombre de jours de RTT des cadres (…). C’est-à-dire remettre à plat complètement si on veut retrouver un peu de compétitivité".
Si l'UMP souhaite aujourd'hui revenir sur les 35 heures, c'est peut-être en réalité parce que les heures supplémentaires sont défiscalisées, ce qui représente de l'argent en moins pour l'Etat. C'est pour cette raison que dans ses propositions, le parti majoritaire envisage de forcer un peu la main aux entreprises : les entreprises qui "traîneraient des pieds" pour négocier verraient ainsi leur allègement de charges revu à la baisse. Et les salariés pourraient être d'avantage imposés sur les heures supplémentaires.