L’usine Kerguelen, implantée à Lamballe dans les Côtes d’Armor, employait 80 salariés, qui travaillaient dans l'abattage de veaux et l'élaboration de produits transformés. Le site a fermé fin août, après avoir licencié une cinquantaine de salariés pour faute grave. Un motif de licenciement étrange pour un si grand nombre de salariés, vivement contesté par les employés et les syndicats.
Cette entreprise bretonne appartenant au groupe Bigard, le premier groupe d’abattage et de transformation de viande en France, souhaitait fermer rapidement le site. Mais son empressement pourrait l’avoir conduit à des procédures de licenciement illégales.
Des fautes graves étranges
“En 15 jours, au sein d'une même société, 45 personnes ont été licenciées pour faute grave. Et toutes ou presque pour avoir proféré des insultes envers leurs supérieurs hiérarchiques. C'est du jamais vu“, s’indigne Loïc Cauret, le maire de Lamballe, dans les colonnes du journal Le Télégramme.
Le licenciement pour faute grave est d’autant plus suspect que l’entreprise n’a pas hésité à remercier un salarié pour abandon de poste alors qu'il était… en accident du travail.
Une fermeture de site accélérée
Pour les syndicats, l'explication est limpide. "Bigard voulait arriver à vider le site extrêmement rapidement sans doute pour le vendre à un acquéreur dans des délais imposés", dénonce l’avocate des salariés, Florence Richefou. Et voulait s'éviter au passage un plan social. C'est la procédure légale en cas de fermeture d’une usine ; mais longue à mettre en place, elle s’accompagne du paiement des indemnités de licenciement et de préavis.
Autre élément que pointe l'avocate des employés : dans le cadre de la procédure de licenciement, l’entreprise a bien versé des sommes variables aux salariés concernés, qui ont le statut de dommages et intérêts et sont donc exemptées de charges sociales à l'exception de la CSG et de la CRDS. Or, selon le droit du travail, un licenciement pour faute grave n’y donne normalement pas droit. Une manière implicite, donc, de reconnaitre l'absence de faute grave.
Reconnaitre le licenciement économique
La CGT a donc décidé de lancer une procédure aux prud’hommes pour que ces départs soient reconnus comme licenciements économiques.
"L'inspection du travail a verbalisé l’entreprise il y a une huitaine de jours pour licenciements abusifs. On demandera réparation du préjudice moral", a menacé Daniel Jehan, secrétaire de l'Union locale CGT de Lamballe. "C'est remise en cause du code du travail".