Après l'annonce de l'incendie criminel contre la rédaction du journal satirique Charlie Hebdo, les politiques français ont fait part de leur indignation mercredi. A gauche comme à droite, la condamnation est unanime.
Jean-François Copé n'a pas hésité à parler d'"attentat" contre Charlie Hebdo. "Il est nécessaire que tous autant que nous sommes, quelles que soient nos sensibilités, nous condamnions avec la plus grande force ce qui n'est rien d'autre qu'un attentat contre un journal dans un pays qui doit incarner la liberté d'expression", a dit le patron de l'UMP sur Europe 1. "Je le condamne avec la plus grande force (...) Il n'y a pas d'impunité, c'est un acte qui doit donner lieu à des poursuites judiciaires", a-t-il ajouté.
Le Premier ministre, François Fillon, a lui aussi fait part de son indignation et a demandé au ministre de l'Intérieur, Claude Guéant, que "toute la lumière soit faite" et que "les auteurs soient poursuivis". "La liberté d’expression est une valeur inaliénable de notre démocratie et toute atteinte à la liberté de la presse doit être condamnée avec la plus grande fermeté. Aucune cause ne saurait justifier une action violente", affirme-t-il dans un communiqué. Le ministre de l'Intérieur s'est rendu sur place mercredi à la mi-journée.
"Pas de démocratie sans irrévérence"
Le ministre de la Culture et de la communication, Frédéric Mitterrand, a condamné une attaque "intolérable". "Il n'y a pas de démocratie sans irrévérence, sans parodie ou sans satire. J'exprime ma plus profonde solidarité aux journalistes et aux équipes de Charlie Hebdo et à ses lecteurs", écrit-il dans un communiqué.
Christine Boutin a elle aussi condamné l'incendie. Cet acte "manifeste un symptôme de violence", a souligné la présidente du Parti chrétien-démocrate, faisant valoir que "la liberté de la presse et d'expression sont importantes pour notre pays".
Xavier Bertrand, le ministre du Travail, s'est de son côté déclaré "profondément choqué" par l'incendie. "Heureusement que la liberté d'expression dans un pays comme le nôtre est garantie et protégée contre tous les excès et contre tous les arbitraires", a-t-il ajouté.
Nathalie Kosciusko-Morizet, la ministre de l'Ecologie, a qualifié les incendiaires d'"ennemis de la démocratie". "On n'est pas forcément lecteur de Charlie Hebdo, mais si on attaque Charlie Hebdo, on doit tous, tous ceux qui croient en la démocratie, être unis pour dire que ce n'est pas acceptable, que ce ne sera pas accepté", a estimé la ministre. "Il y a un droit de la presse et si on n'est pas content de ce qui est dit dans un journal, on attaque en justice, mais on met pas une bombe de toute façon", a-t-elle encore fait valoir.
Quant à la présidente du Front national, qui a condamné cet incendie, Marine Le Pen l'a imputé à des "groupes politico-religieux décidés à contester le modèle laïc" de la France. "Ceux qui ne supportent pas notre modèle, notre valeur doivent être reconduits à la frontière", a-t-elle affirmé. L'équipe de campagne de la candidate frontiste à la présidentielle avait indiqué un peu plus tôt qu'il était "temps que les pouvoirs publics régissent fermement" à cette nouvelle forme de "terrorisme".
"Connerie fanatique"
A gauche, Cécile Duflot a elle aussi fustigé sur son compte Twitter la "connerie fanatique qui opprime et violente". Le maire de Paris, Bertrand Delanoë, s'est lui dit prêt à aider la rédaction de Charlie Hebdo à trouver de nouveau locaux. "On peut ne pas être d'accord avec le numéro de Charlie Hebdo aujourd'hui mais nous sommes dans une société qui a besoin d'une liberté d'expression", a fait valoir le maire de la capitale. "Cette attaque me révolte et si je peux aider Charlie Hebdo à retrouver des locaux pour pouvoir faire vivre son journal et sa liberté je le ferai" a-t-il ensuite proposé.
Sur Twitter, Arnaud Montebourg a lui aussi apporté son soutien au journal, "victime de l'intolérance", écrit-il.
François Hollande a fait part de son "indignation". Dans un communiqué, le candidat socialiste à la présidentielle "adresse toute sa solidarité à ce journal, sa rédaction et ses lecteurs". "Aucune atteinte à la liberté de la presse ne peut être acceptée. Encore moins quand elle prend des formes violentes et destructrices", poursuit-il. "Le fondamentalisme religieux sous toutes ses formes doit être dénoncé. Et le combat pour la liberté d'expression demeure, hélas, d'une désolante actualité", conclut François Hollande.
La première secrétaire du Parti socialiste a pour sa part exprimé la "totale solidarité" de son parti avec l'équipe de Charlie Hebdo. "La liberté de la presse s'exerce aussi à travers la dérision et l'humour. Tout coup porté à cette liberté est un coup porté à la démocratie", écrit Martine Aubry.
"Une poignée d'imbéciles, d'abrutis"
Jean-Luc Mélenchon, le candidat du Front de gauche à la présidentielle, a qualifié sur Europe 1 de "répugnant" l'incendie de la rédaction. "Je veux dire ma sympathie mon affection à l'équipe de Charlie Hebdo. Je suis sûr que le journal va trouver la force en lui de rebondir", a-t-il déclaré. Il a également appelé à "avoir la discipline intellectuelle de ne pas confondre une poignée d'imbéciles, d'abrutis qui seront rudement châtiés, je l'espère, avec la masse de nos compatriotes musulmans qui pratiquent leur foi en toute tranquillité". "Charlie assume ses choix éditoriaux, c'est la loi de la liberté de la presse. Le délit de blasphème n'existe pas pour la raison que le blasphème n'existe pas, nous sommes ici la République française, c'est cette loi là qui s'applique", a-t-il ajouté.
De son côté, le président du Conseil français du culte musulman (CFCM) a "condamné fermement" l'incendie de Charlie Hebdo si son caractère criminel était confirmé. Mohammed Moussaoui a estimé que la Une de Charia Hebdo était beaucoup moins "violente" que les caricatures de Mahomet en 2006.
"C'est une attaque contre la liberté d'expression, qui constitue la base de toute société démocratique et ouverte", a déclaré pour sa part Dunja Mijatovic, représentante pour la liberté des médias de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). "Quelles qu'en soient les raisons, les agressions contre une entreprise de presse et ses journalistes sont intolérables. J'ai confiance dans les autorités françaises pour mener une enquête rapide et minutieuse, pour que les auteurs répondent de leurs actes", a-t-elle indiqué.
"Solidarité contre toute tentative d'intimidation"
Le Syndicat Professionnel de la Presse Magazine d'Opinion (SPPMO) a dénoncé mercredi "l'odieux attentat" contre Charlie Hebdo. "Cet attentat par le feu n'est pas seulement une atteinte à la liberté de la presse, à sa libre expression, mais une atteinte à la liberté de pensée tout court", estime le Syndicat dans un communiqué. Pour le SPPMO, "cet acte barbare appelle une solidarité unanime, familles de presse, partis politiques et pouvoirs publics. La solidarité exemplaire de tous est seule à même de faire barrage à toute autre tentative d'intimidation".
Quant au Syndicat général des journalistes Force ouvrière (SGJ-FO), il a condamné cette agression et a tenu à souligner qu'il apporte son soutien aux journalistes et salariés de l'hebdomadaire. La SGJ-FO a "réaffirmé son attachement à l'existence d'une presse libre, indépendante et pluraliste".