L'INFO. Deux femmes portant le voile ont été interdites d'accès à la plage éphémère mise en place à Wissous, dans l'Essonne, ce week-end. Le motif : le règlement intérieur interdit les signes religieux. Une décision prise par le maire UMP, Richard Trinquier. De quoi susciter une polémique dans cette petite ville de 5.000 habitants, alors qu'une association compte porter plainte, rapporte Le Parisien.
Que s'est-il passé ? "Ces dames que l'on a refusées étaient habillées normalement. La seule chose, c'est qu'elle portait un hijab, un voile qui couvrait leurs cheveux et leurs oreilles, sans recouvrir leurs visages", explique Patrick Kitnais, directeur du cabinet du maire, joint par Europe 1. Or, l'article 8 du règlement intérieur de Wissous-Plage interdit l'accès à toute personne qui arborerait "un signe religieux" distinctif. "Il se trouve que le maire était sur place, et il a donc refusé l'accès à ces personnes", poursuit Patrick Kitnais.
Le maire UMP de wissous interdit le voile à plage @le_Parisien à lire demain dans @LeParisien_91pic.twitter.com/CLgkKuFCfn— N'daricaling Loppy (@Ndaricaling) 7 Juillet 2014
Une application de "la loi de la République et de la laïcité", affirme l'élu, qui s'appuie sur la loi de 2004 encadrant le port de signes religieux ostentatoires. Et précise que le voile est interdit à la plage de Wissous "au même titre qu'une croix ou qu'une kippa". Problème : la loi de 2004 ne concerne que "les écoles, les collèges et les lycées publics", selon son article 1. Or, le site accueillant la plage artificielle de Wissous est un "établissement recevant du public" (ERP). Mais Patrick Kitnais assure que ce statut entre dans le cadre de la loi. Il précise par ailleurs que la ville n'a jamais connu de problème lié au voile islamique par le passé.
Un "acte islamophobe" pour l'opposition. En face, le collectif Al Madina, une association locale créée en décembre 2013 dans le but de transmettre "la culture arabo-musulmane", est monté au créneau. "Ce règlement est une discrimination religieuse à l'encontre tous les Wissoussiens", affirme son président, Abdelkrim Benkouhi, contacté par Europe 1. "On nous a sorti la loi de 2004, celle de 2010 sur le voile intégral et un peu de laïcité. Mais ces lois n'interdisent pas les signes religieux dans les lieux publics, elles ne concernent que l'école et la burqa". En outre, "ceux qui en pâtissent, ce sont les enfants", ajoute-t-il.
Dans l'opposition municipale, on s'insurge aussi contre cette décision du maire. "Venant de Monsieur Trinquier, cet acte islamophobe n'est pas étonnant", affirme Régis Roy-Chevalier, maire PS sortant et conseiller municipal, dans Le Parisien. "Nous sommes dans la continuité des idées qu'il partage avec le Front national".
Un maire fort en gueule. Richard Trinquier, qui vient d'entamer son troisième mandat comme maire de Wissous, s'est déjà fait remarquer dans le passé pour des prises de position polémiques. En 1996, il armait les policiers municipaux et s'octroyait lui-même une autorisation de port d'arme. En 2005, il déclarait en conseil municipal que le Parti communiste "devrait être interdit" car "il a du sang sur les mains". Il a également tenté de baptiser une rue du nom du général Salan, ancien chef de l'Organisation armée secrète (OAS). Mais à la mairie, on assume cette nouvelle décision controversée : "contrairement à d'autres maires, lui, il ne se dégonfle pas".
Richard Trinquier et ses adjoints ont rencontré lundi soir le collectif Al Madina, mais chacun a campé sur ses positions. L'association envisage une action en justice. "On va essayer de faire tout ce qu'on peut", martèle son président, pour qui "ce n'est pas un combat de l'islam, c'est un combat de liberté".
JUSTICE - La CEDH tranche sur l'interdiction du voile intégral en France