Grandpuits : un déblocage illégal

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avec AFP et Martin Feneau , modifié à
La préfecture a réquisitionné des salariés, mais la justice suspend l'arrêté préfectoral.

Après le ton ferme, le gouvernement a tenté la manière forte, mais la justice lui a donné tort. La raffinerie Total de Grandpuits, en Seine-et-Marne, dont les accès étaient bloqués par les grévistes depuis plusieurs jours, a été réquisitionnée tôt vendredi matin par la préfecture. Contestée par les syndicats, l'arrêté préfectoral de réquisition a été suspendu par le tribunal administratif de Melun. Le préfet avait justifié son intervention par le risque de "troubles graves à l'ordre public".

Trois blessés légers

Les gendarmes ont dégagé l'accès de la raffinerie, vers 9 heures vendredi matin, après un face à face tendu avec les grévistes. Trois membres du piquet de grève ont été blessés, selon la CGT. Les salariés réquisitionnés sont rentrés dans la raffinerie et les gendarmes sont repartis après avoir débloqué l'accès.

Les forces de l'ordre, agissant à mains nues, ont poussé les manifestants pour dégager le portail de la raffinerie et c'est au cours de cette bousculade que les personnes ont été légèrement blessées. Le coordinateur CGT du groupe Total, Charles Foulard, a dénoncé une "charge scandaleuse". "Les collègues blessés, un syndicaliste et deux salariés, ont reçu des coups de pied" a t-il dénoncé.

Les grévistes n'étaient pas les seuls à se mobiliser. Un "cordon citoyen" d'environ 80 personnes, habitants du quartier ou militants d'autres corporations, a tenté d'empêcher la réquisition de la raffinerie.

"Une entrave au droit de grève"

Cette intervention survient après les déclarations de Nicolas Sarkozy, en Conseil des ministres mercredi matin. Le chef de l'Etat avait ordonné le déblocage de la totalité des dépôts de carburants, pour tenter de rétablir l'approvisionnement des stations-service.

Une méthode que dénoncent les syndicats. Pour Charles Foulard, coordinateur CGT du groupe pétrolier Total, la réquisition est "une entrave au droit de grève" des salariés, a-t-il déclaré sur Europe 1 , vendredi matin. "On n'est pas en train de mener le débat du désespoir", a-t-il souligné.

Charles Foulard estime que le mouvement de grève pourrait "créer un électrochoc", du côté du gouvernement :

Réquisition au nom d'un code Défense

Le préfet de Seine-et-Marne, Michel Guillot, en compagnie de certains de ses collaborateurs, "est venu lui-même donner les réquisitions au personnel dans le but d'alimenter les stations-service et tous les clients de Total, tout ça sous prétexte d'un code Défense", s'est insurgé le responsable syndical.

"Nous ne sommes pas en guerre, nous ne sommes pas en état de siège, le code défense ne s'applique pas dans ce cas-là", a-t-il martelé. La préfecture de Seine-et-Marne, jointe par l'AFP, n'a pas fait de commentaire.

"Faire opposition de façon juridique"

Les syndicats ont décidé de "faire opposition de façon juridique" aux réquisitions. L'intersyndicale a donc introduit vendredi après-midi une procédure en référé pour faire annuler ces réquisitions, avec succès. La CFDT a fait de même après des réquisitions similaires au dépôt Total de Gargenville, dans les Yvelines. En outre, un jugement est attendu à Nantes dans l'après-midi après un recours contre la réquisition de quatre salariés du dépôt Total de Donges, en Loire-Atlantique.

Le déblocage de Grandpuits "va soulager la région parisienne pendant deux jours, pas plus, faut pas rêver. Aujourd'hui les produits finis il y en a très peu, les mélanges ne sont pas faits. C'est une grosse opération médiatique pour dire 'regardez comme je suis ferme'", a réagi un porte-parole de la CGT Total.