L'expulsion en plein mois de janvier d'une mère célibataire et son bébé, mis à la porte d'un logement de 4 mètres carrés, a mis en lumière un problème quotidien pour les victimes de la crise du logement : la persistance des logements indignes loués à des prix exorbitants. Le gouvernement a bien prévenu qu’il y aurait des sanctions, d’autant que louer un appartement de moins de 9 mètres carrés est officiellement illégal. Mais dans les faits, il y a des exceptions et elles sont nombreuses, sans être toujours illégales.
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• Les astuces des propriétaires. Trouver un logement en-dessous des normes, c’est facile, y compris dans les agences immobilières ayant pignon sur rue à Paris. Exemple : "A louer belle chambre de 8 mètres carrés, centre de Paris, pour 550 euros par mois". A priori, une telle annonce est illégale, puisqu’on est en-dessous des 9 mètres carrés. Sauf que le propriétaire a trouvé une astuce : l’appartement propose une bonne hauteur sous plafond si bien qu’en volume, la chambre fait 20 mètres cube... ce qui est autorisé par la loi.
• Peu de sanctions. Non seulement la loi autorise de nombreuses dérogations, mais son non-respect n’est que rarement sanctionné. Europe 1 s’est ainsi rendu chez Sharaz, qui loue un appartement près de la place de la République, à Paris. La valse des chiffres commence alors : sur le bail, ce logement fait 5,90 mètres carrés. Dans les faits, la surface habitable est de 2,5 m2, c’est-à-dire la taille d’une grande table de salon, le tout avec un plafond en pente. Mais il y a pire : le locataire touche des allocations logements parce que son propriétaire a déclaré que l'appartement faisait un peu plus de 9mètres carrés… et personne n'a pas vérifié.
• Les locataires se plaignent rarement. Face à ces dérives, Christophe Robert, délégué général de la fondation Abbé Pierre, espère plus de contrôles et de sanctions. Sauf que les victimes de ces arnaques osent rarement parler. "Souvent, ce sont les voisins qui ont dénoncé de telles situations. Il y a eu une fuite d’eau, un voisin a vu dans quel état vivait son voisin du dessus", a-t-il détaillé, mardi matin sur Europe 1. Et la fondation Abbé Pierre d’espérer des sanctions plus sévères et fréquentes.
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• Pour les propriétaires, ce n’est "pas forcément invivable". Des sanctions revues à la hausse, l'Union nationale de la propriété immobilière (UNPI) n’en veut pas. "Cela me fait penser à la prostitution" et la pénalisation des clients, a répliqué son président, Jean Perrin, mardi sur Europe 1. "La loi a éliminé un certain nombre de logements de 7 ou 8 mètres carrés qui n’étaient pas forcément invivables. Il fallait peut-être les aménager mieux", a-t-il poursuivi, avant d'argumenter : "on ne construit pas assez de logements" et "si on interdit ces logements, toutes ces personnes, on les met où ?"
• Comment certaines agences débusquent les abus. Les annonces immobilières aux limites de la légalité sont donc nombreuses, quand elles ne sont pas tout simplement hors-la-loi. Ainsi, le réseau "Particulier à particulier" en reçoit plus de 500 par an, si bien qu’aujourd'hui, trois personnes se consacrent entièrement au contrôle des annonces. C’est le cas de Sabrina Kioki, qui précise : "le cas qui nous met un doute, c’est quand il n’y a pas de surface et qu’on a un loyer très bas, on se doute souvent que la personne ne souhaite pas mettre la surface parce qu’elle n’a pas le droit de le louer. Donc quelqu’un demandera un titre de propriété pour justifier tout cela. Sinon, toujours en rubrique habitation, on peut avoir des biens qui sont des bureaux ou des caves qui ne sont pas louables. Auquel cas, les annonces sont bien évidemment annulées".
• Les ventes immobilières, l’autre thermomètre. Si louer un logement de 5 ou 6 mètres carrés est interdit, il est en revanche autorisé de le vendre. Résultat, on trouve fréquemment chez les agences immobilières des dizaines d'annonces de très petites chambres à vendre à Paris pour 70.000 ou 80.000 euros.