Un document de plus entre les mains de la justice française. Un rapport de synthèse de la police luxembourgeoise, daté du 19 janvier 2010, et révélé mercredi par Médiapart, renforce les soupçons de rétrocommissions vers la France via une société off-shore créée avec l'aval du ministre du Budget Nicolas Sarkozy, en 1994. Sans toutefois apporter la preuve directe, d'un financement occulte de la campagne d'Edouard Balladur, en 1995.
Constitution de la société Heine
Ce rapport de synthèse des policiers luxembourgeois rappelle que le chef de l’Etat a "directement" supervisé, lorsqu'il était ministre du Budget d'Edouard Balladur, la constitution de la société Heine, basée au Luxembourg. C'est par cette entreprise que transitaient les commissions, légales jusqu'en 2000, sur des contrats d'armement conclus par la Direction des constructions navales" (DCN).
"En 1995, des références font croire à une forme de rétrocommission (illégale, ndlr) pour payer des campagnes politiques en France", indiquent les policiers luxembourgeois dans leur rapport. Et ceux-ci de conclure : "Finalement, une partie des fonds qui sont passés par le Luxembourg reviennent en France pour le financement de campagnes politiques françaises".
Précédents indices
Le nom de la société Heine était déjà apparu dans une enquête préliminaire : les policiers français avaient déjà trouvé une note mentionnant l'aval de la création de cette société du directeur de cabinet d’Edouard Balladur à Matignon, Nicolas Bazire, et celui du ministre du Budget d'alors, Nicolas Sarkozy.
Trois procédures sont ouvertes en France sur Karachi, dont une sur l'attentat, qui a fait 14 morts, dont 11 ingénieurs et techniciens français de la DCN travaillant sur le contrat des sous-marins, en 2002 au Pakistan. Jacques Chirac ayant ordonné l'arrêt du paiement des commissions à l'homme d'affaires d'origine libanaise Ziad Takieddine après son élection en 1995, la justice française soupçonne que l'attentat soit une opération de représailles commanditée par des militaires pakistanais.
Selon le quotidien Libération daté du 26 avril, la campagne présidentielle d'Edouard Balladur en 1995 aurait reçu 10 millions de francs (1,5 million d'euros) en espèces provenant de rétro-commissions occultes liées à la vente de sous-marins français au Pakistan.