C'est un coup de tonnerre. Le Conseil constitutionnel a décidé vendredi l'abrogation immédiate de la loi sur le harcèlement sexuel dont il a jugé la formulation trop floue.
L'article concerné du code pénal, le 222-33, stipulait simplement que "le fait de harceler autrui dans le but d'obtenir des faveurs de nature sexuelle est puni d'un an d'emprisonnement et de 15.000 euros d'amende", rappelle le Conseil dans une décision publiée sur son site. Son abrogation "est applicable à toutes les affaires non jugées définitivement", c'est-à-dire en cassation, précise-t-il.
Une QPC posée par Gérard Ducray
Le Conseil constitutionnel avait été saisi du problème par le biais d'une question prioritaire de constitutionnalité soulevée en cassation par Gérard Ducray. En 2011, l'ancien député du Rhône avait été condamné pour harcèlement sexuel en appel à trois mois de prison avec sursis et 5.000 euros d'amende.
Gérard Ducray considérait que le code pénal laissait au juge une trop grande marge d'appréciation des éléments constitutifs du délit qui lui était reproché. Il permettait "tous les débordements, toutes les interprétations", avait plaidé son avocate lors de l'audience devant les Sages, le 17 avril.
Un article contraire à la constitution
De fait, le Conseil constitutionnel a considéré que les dispositions de l'article incriminé méconnaissaient "le principe de légalité des délits et des peines". Il les a donc déclarées contraires à la Constitution.
Paradoxalement, une association de défense des droits des femmes, l'Association européenne contre les violences faites aux femmes au travail (AVFT), s'était jointe à la procédure pour demander elle aussi l'abrogation de ce texte trop vague. Afin d'éviter un dangereux vide juridique, elle demandait néanmoins que l'abrogation soit faite de manière différée. Les Sages ont quant à eux estimé qu'une application différée de l'abrogation aurait été contraire au principe de non rétroactivité de la loi pénale.