Assis devant une table de bridge, dans la bibliothèque qui jouxte son bureau, au rez-de-chaussée de "La Boisserie", le général de Gaulle fait une réussite en attendant le journal télévisé, quand il est pris d’un malaise. Diagnostic : rupture d’anévrisme. Vingt minutes plus tard, Charles De Gaulle décède. Il est 19h30, en ce lundi 9 novembre 1970.
"Le général De Gaulle est mort. La France est veuve"
La nouvelle ne sera rendue publique que le lendemain matin. A 13h, c’est le président Georges Pompidou qui l’annoncera lui-même, dans une courte allocution radiotélévisée: "Français, Françaises, dit-il, le général De Gaulle est mort. La France est veuve."
Charles de Gaulle allait avoir 80 ans. Désavoué par les Français à l’issue d’un référendum prétexte, il vivait retiré sur sa propriété de Colombey-les-Deux-Eglises depuis plus d’un an. Pourtant, sa mort a fait l’effet d’un coup de tonnerre.
Marianne pleure contre un chêne abattu
En lettres énormes, cet après-midi là, la nouvelle barre la une du Monde, qui reprend les termes de l’hommage du président Pompidou : de Gaulle "a donné à la France actuelle ses institutions, son indépendance, sa place dans le monde." Le lendemain matin, dans Le Figaro, c’est le dessinateur Jacques Faizant qui illustre le deuil national à travers un croquis devenu célèbre : Marianne qui pleure contre un chêne abattu.
Les hommages viennent du monde entier. En France, adversaires politiques et personnalités se rejoignent dans un concert de louanges inattendu : de Brigitte Bardot ("La France a perdu un homme d'Etat et un général de grande classe") à l’éternel opposant, François Mitterrand ("On ne peut pas aimer la France plus qu'il ne l'a aimée") en passant par le cardinal Danielou ("Le général de Gaulle est le type du laïc chrétien, à la fois dans la valeur de sa vie privée et dans cet esprit de service, de don total de soi-même qu'il a poussé à un degré héroïque, au service, non seulement de la France mais de Dieu")
La France lui rend hommage
Bien avant l’Elysée, le général de Gaulle avait fixé le cérémonial de ses funérailles. "Je veux que mes obsèques aient lieu à Colombey-les-Deux-Eglises. Si je meurs ailleurs, il faudra transporter mon corps chez moi, sans la moindre cérémonie publique. Ma tombe sera celle où repose déjà ma fille Anne et où, un jour reposera ma femme. Inscription : Charles De Gaulle (1890-….). Rien d’autre."
Ses dernières volontés ne seront pas tout à fait respectées. Le 12 novembre, jour de ses obsèques, une cérémonie officielle réunit 80 chefs d’état et de gouvernement en la cathédrale Notre-Dame-de-Paris. En tout, 103 pays sont représentés. Pour les Etats-Unis, le président Nixon est venu, accompagné de son puissant ministre des Affaires Etrangères, Henry Kissinger mais aussi de Ted Kennedy, frère de l’ancien président.
Dans la foule : le chah d’Iran, le premier ministre indien Indira Ghandi, l’empereur d’Ethiopie Haile Selassié, mais aussi la reine des Pays Bas, le prince Charles, le prince Juan Carlos. Pour la Côte d’Ivoire, le leader historique, Félix Houphouët-Boigny. Pour la République Centrafricaine, le président Jean-Bedel Bokassa, dont les excès sanguinaires ne seront connus que plus tard.
Le 10 novembre 1970 : " le général est mort"
Reportages Europe numéro 1 du 10 au 12 novembre 1970, de l’annonce de la mort du général de Gaulle au soir suivant les obsèques à Colombey.
Plus de 40 000 personnes, venues de tout le pays, se pressent autour de la petite église du village quand arrive le cercueil posé sur un blindé. Comme il l’avait souhaité, Charles de Gaulle repose dans le cimetière de Colombey, entre sa femme et sa fille Anne.