L’affaire Neyret, avec la mise en examen lundi du numéro 2 de la PJ lyonnaise, met en exergue les zones d’ombre entourant rémunération de leurs informateurs. Ces "indics", ou "tontons" dans le jargon policier, ont toujours été des intermédiaires précieux pour la résolution des enquêtes. La loi sur la sur la sécurité de 2004, dite Perben II, encadre, en théorie strictement, la rémunération de leurs renseignements.
Le paiement des informateurs encadré depuis 2004
Avant 2004, le paiement des informateurs, ou plutôt leur rétribution avec une partie de la prise de stupéfiants par exemple, était toléré mais demeurait opaque. De plus, les informateurs n’avaient aucune existence légale. Ce qui obligeait les fonctionnaires de police à s’accommoder de ce vide juridique.
Depuis 2004, le cadre est clairement fixé. "Les services de police et de gendarmerie peuvent rétribuer toute personne étrangère aux administrations publiques qui leur a fourni des renseignements ayant amené directement soit la découverte de crimes ou de délits, soit l'identification des auteurs de crimes ou de délits", prévoit la loi Perben II.
Désormais, comme l’explique Christian Lothion, le directeur central de la police judicaire, la police dispose d’une enveloppe en argent sonnant et trébuchant pour rétribuer ses indics, mais "la somme ne peut être révélée". Car la situation des ces informateurs, courroie de transmission entre le milieu du banditisme et celui de la police, nécessite de préserver leur anonymat.
Selon Christophe Cornevin, auteur du livre Les Indics à paraître mercredi, quelque 1.700 indicateurs de police sont officiellement recensés dans une base de données en France. Ils sont rémunérés 50 euros pour la dénonciation d'un clandestin et jusqu'à 10.000 euros pour celle d'un trafic de drogue.
"On vit dans le monde des Bisounours"
Le commissaire Neyret est accusé d’avoir franchi la ligne jaune sur deux points précis : sa promesse présumée de fournir 10 kg de cannabis à l’un des informateurs ayant eu sa voiture endommagée et ses contacts réguliers avec des trafiquants présumés. Un système "hypocrite" pour l'avocat lyonnais, David Metaxas.
"Depuis quelques jours, on vit dans le monde des bisounours ou alors on se drape dans des manteaux de virginité qui ne sont pas conformes à la réalité", dénonce l'avocat au micro d'Europe 1. "Pour avoir des résultats, il faut infiltrer. Pour infiltrer, l'argent liquide, ça ne suffit pas. Vous ne pouvez pas vous présenter en face d'un mec qui est en train de transporter plusieurs centaines de kilos de résine de cannabis ou de drogue dure en lui parlant deux minutes", poursuit Me Metexas.
"C'est du travail de longue haleine" :
"On ne peut pas lui dire, tu vas être gentil, tu vas me donner des tuyaux. C'est tout sauf sérieux. Il faut des réseaux d'information, des indics sûrs. Il faut aussi pour la police, garantir la sécurité des indics en question. Il faut appâter. Ça se paye cher. C'est du travail de longue haleine", précise l'avocat.
"Ça pose la question de la légalité du système. Je trouve qu'il y a de l'hypocrisie. Ça a été dénoncé, c'est vrai. J'ai envie de dire à la JIRS de Paris l'homme que vous avez entre les mains est l'homme grâce auquel vous existez. Ces pôles juridiction inter-régionales spécialisées s'occupe de la grande criminalité. quand je vois les résultats du service, j'ai le sentiment que sans lui, à Lyon, le pôle JIRS aurait été au chômage", conclut-il.