Les mineurs jugés bientôt comme des adultes. C'est tout l'enjeu du débat qui s'ouvre mardi à l'Assemblée nationale avec l'examen d'un projet de loi très controversé qui prévoit l'entrée de jurés populaires en correctionnelle et la réforme en profondeur de la justice des mineurs.
Au programme également, la création d'un tribunal correctionnel pour mineurs pour les récidivistes de plus de 16 ans, pour des délits passibles de plus de trois ans de prison. Objectif du gouvernement : sanctionner plus vite et plus fort les 13-17 ans avec notamment un système de comparution immédiate et un envoi plus systématique en centre éducatifs fermés.
"Le jeune, il s’en fout"
Mais pour l’avocate Dominique Attias, c'est l’effet inverse qui risque de se produire. "Une fois que le couperet est passé, le jeune, il s’en fout. Il va passer immédiatement comme un type de 40 ans devant un juge et il va être condamné. Il s’en fout", tempête-t-elle au micro d’Europe 1.
"Il n’aura même pas eu le temps de travailler, de comprendre. Et si c’est pour qu’il puisse ensuite rentrer dans le quartier en disant : ‘t’as vu, je suis allé en prison, je suis devenu un caïd', quel est notre bénéfice? Quel est le bénéfice pour le jeune ?". Et l’avocate de préciser qu’une journée en centre éducatif fermé coûte 1.500 euros, avec un fort risque de récidive.
Des jurés populaires en correctionnelle
Le texte prévoit aussi l'introduction de jurés populaires dans les tribunaux correctionnels. Et ce, alors qu'actuellement, ils ne siègent que dans les cours d'assises qui jugent les crimes. Le texte propose donc la formation de tribunaux correctionnels ouverts à des "citoyens assesseurs" qui pourront participer au jugement des délits punis d'une peine égale ou supérieure à cinq ans d'emprisonnement. Ils pourront également participer à la justice pénale en matière de décisions d'application des peines.
Ces "citoyens assesseurs" seront, en nombre, toujours majoritaires. Ils ne seront pas choisis sur leurs qualités professionnelles, ils ne seront pas non plus magistrats, ni même spécialisés. Ils feront "un service obligatoire" d'une semaine. Ils seront tirés au sort dans la matinée, avant d'être formés l'après-midi. Chaque "citoyen assesseur" aura accès au dossier et pourra également poser toutes les questions qu'il souhaite. Ils seront également contraints de participer au délibéré.
Cette disposition est loin de faire l'unanimité, notamment parce que leur introduction dans la justice risque d'alourdir les audiences et de ralentir les jugements.
Des cours d’assises "light"
Par ailleurs, l'Assemblée a adopté en commission un amendement qui prévoit de créer une cour d'assises simplifiée - trois magistrats et trois jurés - pour les crimes punis de 15 à 20 de réclusion.
Présenté en urgence, le texte a déjà été adopté par le Sénat en mai et devrait être définitivement voté avant le 14 juillet. Mais d’ici là, les débats dans l’Hémicycle promettent d'être houleux.