Sous le coup d’un mandat d’arrêt international délivré par la Suède, Julian Assange a été arrêté mardi par la police britannique, et a passé sa première nuit en prison. Le fondateur de WikiLeaks est accusé de viol et d’agression sexuelle par deux femmes. Mais pour son avocat Mark Stephens, qui s’appuie sur les documents de procédure, son client devrait être accusé de "sexe par surprise", un délit reconnu par la justice suédoise, et non de viol. Retour sur les faits.
La femme "A", la femme "B"
Selon le Daily Mail, qui a eu accès aux fameux documents, Julian Assange a débarqué en Suède le 11 août 2010 pour participer à un séminaire à l’invitation du Parti social-démocrate suédois. Il restera une semaine à Stockholm, au cours de laquelle il aura des relations sexuelles avec deux femmes différentes, selon le quotidien britannique, traduit par le journaliste Patrice Thomas sur son blog.
La première de ces "victimes" présumées n’est autre que l’une des organisatrices du séminaire. La "femme A", comme l’appellent les policiers suédois dans leurs comptes-rendus, avait offert de prêter son appartement à Julian Assange, puisqu’elle-même devait être absente. Finalement retenue à Stockholm, elle a accepté de partager son domicile avec son invité.
Un préservatif craque
"Puis ils sont sortis pour dîner", raconte un policier. "Quand ils sont rentrés, ils ont eu des relations sexuelles, mais il y a eu un problème avec le préservatif, qui a craqué. La plaignante a dit qu’elle pensait que Julian Assange a fait cela délibérément. Lui a insisté disant que c’était un accident." La femme a voulu stopper leurs ébats, mais Julian Assange aurait refusé. Premier grief.
Dès le lendemain, la "femme B" faisait son apparition. C’est une jeune femme de 20 ans environ, fascinée par l’action et la personnalité du fondateur de WikiLeaks, et qui s’était débrouillée pour se faire embaucher dans le personnel d’accueil du séminaire. Lors de la prise de parole de Julian Assange, elle était assise au premier rang. Puis elle est parvenue à se faire inviter au restaurant en compagnie du groupe accompagnant le fondateur de WikiLeaks.
Au cours du repas, et au prix d’efforts visibles, selon un participant, elle est parvenue à attirer l’attention de Julian Assange. Les deux protagonistes ont alors faussé compagnie à leurs camarades et sont allés au cinéma où, de l’aveu même de la jeune femme, ils "sont allés bien au-delà des baisers et des caresses". Deux jours plus tard, les deux amants se sont revus, chez la jeune femme. Le couple a de nouveau eu des relations sexuelles, mais cette fois Julian Assange aurait refusé de mettre un préservatif, malgré l’insistance de sa partenaire.
Une magistrate militante
L’affaire aurait pu en rester là si les deux femmes ne s’étaient pas rencontrées. La première avait en effet embauché la seconde pour le séminaire, et au cours d’une conversation, elles se sont rendu compte qu’elles avaient toutes les deux eu une aventure avec le même homme. Après avoir toutes deux évoqué des rapports non protégés et leur peur d’une maladie sexuellement transmissible, elles ont décidé de porter plainte au commissariat, notamment parce que Julian Assange a refusé de se plier à un test de dépistage.
Pour James Catlin, qui a été l'avocat de Julian Assange, "cette affaire entrera dans l'histoire comme l'affaire du préservatif. Il y a un préservatif au début. Et puis il n'y a plus de préservatif. Et le rapport est toujours consenti. Mais par la suite, les femmes en question disent : "voilà, le préservatif aurait dû rester en place tout le temps, alors tu as fait quelque chose de mal"".
Une amende de 546 euros
La plainte ayant été jugée recevable, restait à définir les chefs d’accusation. Pour deux premiers procureurs, les faits ne justifient pas la qualification de viol, mais uniquement de "sexe par surprise", un délit passible en Suède de 5.000 couronnes, soit 546 euros. Mais pour une troisième, Marianne Ny, cela ne fait aucun doute. Car la magistrate milite pour une réforme des lois suédoises sur le viol, et notamment l’extension au refus de porter un préservatif.
C’est sur cette base que Marianne Ny a relancé l’enquête pour viol et agression sexuelle et lancé un mandat d’arrêt international sur ces qualifications. Qui font peser sur Julian Assange une peine potentielle de quatre ans de prison.
La crainte d'une extradition
L'arrestation de Julian Assange marque pour lui la fin d'une vie de fugitif. Il n’utilisait plus sa carte bleue, changeait très souvent de téléphone portable, ne disait jamais où il se rendait. Bref, une vie en sous-marin. En se livrant, Julian Assange est donc entré dans le système judiciaire international. La Suède a la priorité, mais les Etats-Unis peuvent déposer une demande d'extradition pour récupérer Julian Assange. C'est ce que craint d'ailleurs le fils du fondateur de WikiLeaks.