Il est surnommé "Niangal Sall" en wolof , "sévère Sall". L'ex-Premier ministre d'Abdoulaye Wade est connu pour être introverti, certain estimant qu'il manque de charisme. Il a pourtant été élu dimanche à la tête du Sénégal. Longtemps considéré comme "l'apprenti" du vieux lion, cet ingénieur et géophysicien de formation, incarne ainsi le changement après 12 ans de règne sans partage du clan Wade.
"Je serai le président de tous les Sénégalais", a promis Macky Sall dimanche soir. "Ce soir une ère nouvelle commence pour le Sénégal", s'est félicité le vainqueur du scrutin, qui lui aussi a salué la maturité des électeurs et de la démocratie sénégalaise. "L'ampleur de cette victoire aux allures de plébiscite exprime l'immensité des attentes de la population, j'en prends toute la mesure. Ensemble, nous allons nous atteler au travail", a-t-il conclu.
"Je serai le président de tous les Sénégalais" :
Quinquagénaire issu d'une famille très modeste de quatre enfants, il est tombé très tôt dans le chaudron de la politique. Forgé par le mouvement marxiste de Landing Savané, And jëf, il finit par rapidement tourner le dos à la gauche. Le pragmatique Macky Sall rejoint alors le camp libéral. En 1983, il "débute son compagnonnage avec Wade", raconte Slate Afrique.
Une ascension fulgurante
Pour le jeune Macky Sall, Abdoulaye Wade est le seul à pouvoir mettre un terme au régime d'Abou Diouf. En une petite décennie, Macky Sall s'impose comme l'une des figures incontournables du Parti démocratique sénégalais. La raison ? Il ne fait d’ombre à personne et reste dans le sillage des ténors du parti.
En mai 2001, il entre pour la première fois dans un gouvernement. Et pas des moindres, celui de son mentor. Alors directeur général de la Société des pétroles du Sénéga, Abdoulaye Wade lui confie le portefeuille des Mines, de l'Energie et de l'Hydraulique. Son ascension est fulgurante. Macky Sall enchaîne les maroquins dont celui de l'Intérieur en 2003. En avril 2004, c'est l'heure de la consécration. Son pygmalion le nomme alors Premier ministre, un poste qu'il quittera en juin 2007 pour devenir président de l’Assemblée nationale.
Le temps de la disgrâce
C'est alors que les ennuis commencent. En 2008, le président de l'Assemblée nationale convoque devant les députés le fils du président, Karim Wade alors à la tête d'une agence chargée des travaux pour un sommet islamique de mars 2007 à Dakar. Perçue comme un "piège", cette convocation dont le chef de l'Etat n'a pas été informé, entraîne rapidement sa chute. Grâce au vote d'une nouvelle loi, les partisans de Wade font passer son mandat de cinq à un an.
Acculé, il finit par démissionner de son perchoir et de toutes ses fonctions étatique et élective. "J'ai voulu donner un exemple de résistance républicaine", disait Macky Sall le soir de sa démission, devant plusieurs centaines de partisans. Commence alors une longue traversée du désert dont l'unique but est la reconquête du pouvoir. Il crée l'Alliance pour la République (APR), un parti libéral, sous la bannière duquel il redevient en 2009 maire de Fatick, une commune du centre du Sénégal où il est né. De plus en plus ancré dans l'opposition, Macky Sall refuse depuis lors tout compromis avec Wade, qu'il dit n'avoir pas rencontré depuis son départ du pouvoir.
Reste que le nouveau locataire du palais présidentiel divise. Si l'opposition le perçoit comme "un complice du système Wade", de nombreux Sénégalais voient en lui "l'homme qui a tenté de freiner la dévolution monarchique du pouvoir", conclut Slate Afrique.