C’est la première fois, en une semaine, qu’elle a vu des sourires sur les visages des Iraniens. Ariane Lavrilleux, envoyée spéciale d’Europe 1, était à Téhéran au moment de l’annonce d’un accord sur le nucléaire entre l’Iran et les six grandes puissances à Genève.
Des prix exorbitants. "C'est un grand ouf de soulagement. Je suis présente depuis une semaine, j'ai vu pour la première fois des sourires sur les visages. La première chose que les iraniens attendaient, c'est la fin des sanctions", raconte la reporter. Ces sanctions ont multiplié les prix par trois, parfois par quatre, en seulement six mois, rendant quasiment impossible pour les Iraniens d’acheter quoi que ce soit.
"Un portable coûte 625 euros, soit trois fois le salaire moyen", rapporte-t-elle. "Un chewing-gum coûte le même prix qu'un sandwich il y a six mois", souligne-t-elle. Alors pour pouvoir économiser un peu, nombre de jeunes Iraniens préfèrent rester vivre chez leurs parents.
Téhéran, loin des images caricaturales. En passant une semaine dans la capitale iranienne, l‘envoyée spéciale d’Europe 1 a pu se rendre compte que le quotidien de ses habitants est loin des clichés conçus par l’Occident. "Nous avons une image extrêmement caricaturale de l'Iran. Ici, ce sont des mosquées à moitié vide, des jeunes filles dont les cheveux dépassent à moitié de leur voile, des jeunes femmes extrêmement maquillées qui tiennent par la main leurs compagnons et cela ne choque plus aujourd'hui, il faut le voir", raconte-t-elle.
La consommation, pas le nucléaire. Aujourd'hui, la préoccupation des Iraniens n’est pas la religion ou le nucléaire, mais la consommation. Un commerçant a même écrit sur le mur Facebook du ministère des Affaires étrangères : "Je me fiche de votre uranium, je veux acheter mes produits au prix normal", rapporte notre journaliste.
"Les Iraniens se fichent du nucléaire. Pour eux, la bombe nucléaire n'est même pas un sujet", poursuit l’envoyée spéciale d’Europe 1. "Ils me disent : "nous sommes pacifiques, nous ne voulons pas la bombe nucléaire". Pour eux, la bombe atomique n'a aucune importance ; ils veulent juste des centrales nucléaires pour produire de l'électricité, c'est tout".
Et la France dans tout cela ? Au cours de son reportage, Ariane Lavrilleux a pu constater l’incompréhension des Iraniens vis-à-vis de la position française sur les sanctions appliquées à leur pays. "Ils aiment beaucoup la France, malgré les déclarations et la récente attitude de Laurent Fabius et François Hollande à l'égard de l'Iran", explique-t-elle.
Des conditions de travail "normales". Enfin, l’envoyée spéciale d’Europe 1 raconte n’avoir eu presque aucune difficulté à faire son travail sur place. "Il n'y a presque aucun problème, sinon qu'il faut porter quotidiennement un voile quand on est dans la rue, dans un lieu privé, partout hors de la chambre d'hôtel. Mais ce n'est pas un tchador, juste un petit châle dont les trois-quarts des cheveux s'échappent facilement", détaille-t-elle. La liberté est aussi encadrée : les journalistes doivent déclarer au ministère de la Culture et de l'Information ce qu'ils font et qui ils interviewent. Le "fixeur", qui sert de traducteur et d'assistant du journaliste à l'étranger, doit aussi faire un rapport.
"Il n'y a aucun problème pour interviewer les gens, on me répond assez facilement malgré quelques réticences : les services secrets sont assez importants, un certain nombre de personnes sont emprisonnés pour des motifs politiques. Il y a parfois une réticence à parler des sujets politiques. Mais dès que la glace est brisée, les Iraniens sont extrêmement accueillants envers les journalistes étrangers", conclut l’envoyée spéciale. Au bazar de Téhéran, elle raconte que des agents de sécurité ayant remarqué sa présence ont demandé à des commerçant de répondre par le discours officiel. Une consigne heureusement pas suivie par tout le monde.
ACTU - Nucléaire : l'Iran arrache un accord
DECRYPTAGE - Nucléaire : que fait l'Iran à la centrale d'Arak?
REPORTAGE - Les Iraniens étranglés par les sanctions