Mumia Abu-Jamal enfin libre... du couloir de la mort. Après 30 ans d'une terrible bataille judiciaire, celui qui est devenu l'un des plus célèbres condamnés à mort des États-Unis, a appris mercredi que le procureur de Philadelphie Seth Williams renonçait à demander son exécution.
"Abu-Jamal ne sera plus condamné à mort, mais il restera derrière les barreaux pour le restant de ses jours, et c'est là qu'il doit être", a déclaré le procureur, ajoutant qu'il n'avait "aucun doute", sur le fait que le prisonnier, aujourd'hui âgé de 57 ans, avait tué le policier Daniel Faulkner le 9 décembre 1981.
"Cette décision a été très, très difficile à prendre", a précisé Seth Williams selon le New York Times. "Sa condamnation était appropriée. C'était la peine la plus juste pour l'accusé", a insisté, non sans amertume, le procureur de Philadelphie.
"Les survivants de l'officier Faulkner ont déjà trop souffert", a déploré Seth Williams selon le Los Angeles Times. "La seule issue possible était de laisser son meurtrier mourir en prison", a-t-il conclu.
"Ma famille et moi avons vécu trois décennies d'épreuve à cause de Mumia Abu-Jamal, ses avocats et ses partisans", a regretté la veuve du policier, Maureen Faulkner. "Après 30 ans d'attente, il reste peu de temps avant qu'Abu-Jamal ne soit confronté au juge suprême (Dieu NDLR). J'attends ce jour avec impatience".
"Des jurés induits en erreur"
En avril 2011, la cour d'appel fédérale de l'État de Pennsylvanie avait ordonné une nouvelle audition de l'ancien journaliste radio et militant du mouvement révolutionnaire des Black Panthers. La juridiction estimait que les informations données aux jurés, tous blancs, les avaient potentiellement induits en erreur, précise le quotidien américain. Pas de quoi infléchir néanmoins la Cour suprême américaine. En octobre, elle avait refusé d'examiner le dossier. Pour en finir avec ces coups de théâtre incessants, le procureur de Pensylvannie a donc simplement décidé de renoncer à la peine de mort.
Car en trente ans, Mumia Abu-Jamal était devenu le véritable icône des militants anti-racisme. Rassemblements, site internet dédié, pétitions... les défenseurs de l'ex-militant des Black Panthers n'ont jamais renoncé.
Une pétition signée par Danielle Mitterrand
En janvier 2010, une pétition internationale avait été lancée en ligne pour demander au président américain Barack Obama de se prononcer contre la condamnation à mort. Elle avait recueilli des dizaines de milliers de signatures, dont celles de l'ancienne Première dame de France Danielle Mitterrand, de l'écrivain allemand Günter Grass ou encore du linguiste américain Noam Chomsky.
Presque chaque semaine, des manifestations étaient organisées à travers le monde. Une nouvelle journée d'action était d'ailleurs prévue le 9 décembre à Philadelphie, date anniversaire du meurtre du policier Daniel Faulkner.
"Les procureurs ont fait ce qu'il fallait faire. Après trente ans, il était temps de mettre fin à cette recherche de la peine de mort", s'est réjoui mercredi le NAACP, principale organisation de défense des droits civiques des Noirs américains, qui a assisté le condamné dans sa défense. "Justice est rendue lorsqu'une condamnation à mort par un jury mal informé est annulée", a ajouté son avocate Judith Ritter.