L’INFO. Depuis plusieurs jours, le régime syrien affiche sa confiance. Face aux atermoiements de la communauté internationale, Bachar al-Assad n’hésite pas à adopter un ton martial, parlant même de la Syrie comme d'un futur "cimetière" pour les Occidentaux. Le président syrien a assuré qu’il aurait les moyens de défendre son pays "contre toute agression". Qu’en est-il vraiment ? Explications.
• L’armée syrienne sur le pied de guerre ? Depuis plusieurs jours, les forces armées syriennes ont été repositionnées hors de leurs postes de commandement à Damas car, derrière le discours de façade, l’inquiétude est palpable. Selon l'opposition syrienne, "un grand nombre d'officiers de haut rang" ont déserté. Des mouvements importants ont également été observés depuis 48 heures. A chaque fois cela concerne des bases militaires qui se trouvent sur la liste des cibles remise par les rebelles aux Occidentaux. La priorité du régime est donc visiblement de protéger ses stocks de missiles. Des batteries mobiles de missiles Scud ont quitté jeudi matin une base importante de l’armée sur les contreforts du mont Kalamoune, au nord de Damas, par crainte probablement d'un bombardement occidental, selon l'opposition. "Soit ce matériel va être stocké ailleurs, soit les véhicules ne vont pas cesser de se déplacer pour échapper à d'éventuelles frappes aériennes", a affirmé un combattant rebelle.
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• Quelle est sa puissance ? L'armée syrienne compte en théorie 178.000 hommes, dont 110.000 dans les forces terrestres, 5.000 dans la marine, 27.000 dans l'armée de l'air et 36.000 dans la défense aérienne, selon les derniers chiffres de l'International Institute for Strategic Studies de Londres (IISS). "Les capacités nominales d'avant-guerre de l'armée ont probablement été divisées par deux en raison des défections, des désertions et des pertes subies", précisent les experts de l'IISS. "La plupart des formations ont été affectées. Certaines brigades ont disparu soit parce qu'elles étaient considérées comme politiquement peu fiables ou à cause de pertes sévères", assure l'International Institute for Strategic Studies de Londres.
Pour Bachar al-Assad, l’armée sert davantage à protéger "le régime et non pas la patrie" avec, aux postes-clés, des membres de la communauté alaouite dont est issu le président, accuse Muhammad Hussein al-Haj Ali, un ex-général syrien ayant dirigé l'Académie nationale de défense à Damas et interrogé par Europe 1. Preuve en est : la priorité a été donnée aux forces spéciales -essentiellement constituées d’Alaouites- et sur la Garde Républicaine qui sont considérées comme plus efficaces que l'armée en général. "Il y a 80 ou 85% des officiers de l’armée syrienne qui sont Alaouites alors que la proportion au sein de la population ne dépasse pas 8%. Ce régime n’est pas laïc, il est communautaire", déplore Muhammad Hussein al-Haj Ali au micro d'Europe 1.
• De quel matériel dispose l'armée syrienne ? Elle est équipée d'un matériel essentiellement d'origine russe, voire soviétique, et comptait avant le début des affrontements 4.950 chars. "Ce chiffre a été réduit de façon significative pendant la guerre civile", précise l’IISS. Elle dispose d'un important arsenal de missiles, dont le commandement se trouve à Alep, dans le nord du pays. La marine dispose également de deux frégates. L'armée de l'air a en principe 365 appareils de combat (555 en 2009), la plupart d'origine soviétique. Là aussi, ces chiffres d'avant-guerre sont certainement aujourd'hui bien inférieurs et, selon l'IISS, "le niveau de capacité opérationnelle d'une importante partie de la flotte aérienne est probablement faible".
Mais cela apparaît insuffisant face à la puissance de feu des Occidentaux. L’armée "n’a pas beaucoup de capacités de réaction", assure d’emblée l’ex-général Muhammad Hussein al-Haj Ali qui a rejoint les rangs de l’opposition. L’armée "possède des missiles sol-sol qui peuvent peut-être atteindre 400 km en dehors de la Syrie. Le régime va être ébranlé par les premières frappes", affirme-t-il sur Europe 1.
• La Syrie peut-elle se défendre ? Plus que l’attaque, la Syrie va donc surtout chercher à se défendre en cas de frappes occidentales. Les forces de défense aérienne ont d’ailleurs été moins affaiblies par les combats et disposent de plusieurs milliers de missiles sol-air de fabrication russe. "Les systèmes de missile multifonctionnels sol-air Buk-M2E et d'autres moyens de défense antiaérienne que possède l'armée syrienne vont assurer une réponse appropriée aux agresseurs", précise une source russe citée par l’agence Reuters. La Syrie posséderait dix batteries de tels systèmes multifonctionnels. Les missiles Buk sont un système antiaérien polyvalent et mobile de moyenne portée entré en service en 1979. Il est destiné à la défense de forces terrestres et de points vitaux : ponts, centres de communication, centrales électriques. Des endroits stratégiques qui pourraient être des cibles potentielles pour les Occidentaux.
• Une riposte avec ses alliés ? Si la frappe occidentale est limitée -c’est l’option envisagée pour l’instant-, les alliés d’Assad auront peu d’intérêts à réagir militairement. "Ni le Hezbollah, ni l’Iran n’iront trop loin", assure Joseph Bahout, professeur à Sciences Po Paris, interrogé par l’Agence France Presse. "On peut imaginer des coups 'latéraux et indirects' comme des agressions contre la Finul (la mission de maintien de la paix de l'ONU au Liban) ou des roquettes anonymes tirées sur Israël, mais au fond rien de bien nouveau", précise Joseph Bahout. Mais ces derniers jours, l’Iran et la Russie ont multiplié les mises en garde. Le Kremlin a d’ailleurs annoncé qu’un bateau de lutte anti-sous-marine et un bateau lance-missiles allaient prendre position en Méditerranée.
C’est arrivé cette semaine – 31/08/13