Ils n'ont pas hésité à torpiller le projet de résolution de l'ONU sur la Syrie. La Chine et la Russie ont fait bloc derrière leur allié en opposant leur veto aux "mesures ciblées" prévues contre le régime qui poursuit sa répression sanglante des manifestations de l'opposition.
Derrière les appels à respecter "l'indépendance et l'intégrité territoriale de la Syrie", comme l'a souligné mardi l'ambassadeur de Russie, Vitali Tchourkine, les deux pays dissimulent sans doute des raisons moins louables mais plus rentables.
La Russie vend des missiles à la Syrie
Depuis quelques années, la Russie a renforcé ses liens commerciaux avec la Syrie notamment en vendant "des avions, des missiles et des systèmes de défense aérienne", rappelle l'ancien diplomate Ignace Leverrier sur son blog.
"Elle aimerait lui vendre les avions civils dont la compagnie nationale syrienne a besoin pour remplacer ses vieux Boeing en bout de course, que l’embargo décrété par les Etats-Unis sous la présidence de George W. Bush lui interdit de remplacer, que ce soit par des appareils américains ou européens, dans la mesure où ces derniers contiennent plus de 10 % d’équipements d’origine américaine. Elle souhaite également obtenir le contrat de réhabilitation puis de doublement du pipeline qui conduisait jadis le pétrole de la région de Kirkuk, en Irak, à Banias, sur la Méditerranée", précise-t-il.
La Russie craint la "réédition du scénario libyen" explique également le site de l'agence de presse russe Ria Novosti. Une raison qui justifie également le positionnement des autres pays émergents, les BRICS, qui siègent actuellement au Conseil de sécurité : Brésil, Inde et Afrique du Sud.
Ils estiment que la mise en œuvre, sous commandement de l'Otan, de la résolution 1973 du Conseil de sécurité est allée au-delà des exigences d'un texte qui instaurait une zone d'exclusion aérienne et autorisait des actions militaires pour protéger la population civile des forces de Mouammar Kadhafi.
Quant à la Chine, c'est un partenaire stratégique de la Russie depuis la signature le 16 juillet 2001 de leur "Accord de bon voisinage, d'amitié et de coopération". En juin dernier, le vice-Premier ministre chinois Wang Qishan a également signé un "accord sur la coopération gazière" avec son homologue russe Igor Sechin.
Ainsi, au conseil de sécurité de l'ONU, la Chine défend toujours les intérêts stratégique de son partenaire en échange de son soutien lorsque les intérêts chinois sont menacés.
"Un triste jour pour le Conseil de Sécurité"
Le véto sino-russe a provoqué les foudres des Occidentaux, à commencer par la France.
"Nous ne pouvons plus douter aujourd'hui de la signification de ce veto", a réagi l'ambassadeur de France à l'Onu, Gérard Araud. "Ce n'est pas une question de formulation, c'est un choix politique, c'est un refus de toute résolution du Conseil contre la Syrie."
Le ministre des affaires étrangères, Alain Juppé a regretté mercredi "un triste jour pour le peuple syrien". "C'est un triste jour pour le Conseil de Sécurité", a-t-il ajouté.
Du côté des Etats-Unis, l'ambassadrice Susan Rice a affirmé que son pays était "furieux du fait que ce Conseil ait complètement échoué" dans sa tentative de traiter "un défi moral urgent et une menace croissante à la paix régionale". La diplomate a implicitement condamné Moscou et Pékin qui, a-t-elle dit, "préfèreraient vendre des armes au régime syrien".
Depuis le début de la répression de l'armée contre les opposants au régime de Bachar El-Assad, 2.700 personnes auraient trouvé la mort selon les estimations de l'ONU.