Un "zoo humain" en Inde

Une tribu primitive indienne serait victime d'actes d'humiliation.
Une tribu primitive indienne serait victime d'actes d'humiliation. © EXTRAIT VIDEO THE OBSERVER
  • Copié
Marion Sauveur et AFP
VIDEO - En Inde, des voyagistes organisent des safaris humains avec une tribu primitive.

Une danse primitive en échange d’un peu de nourriture. La tribu des Jarawa subit les humiliations des touristes occidentaux. C’est ce que montre une vidéo diffusée sur le site du journal britannique The Observer, et réalisée visiblement par un vacancier. Mais non datée.

Regardez le film d’un touriste :

Sur ces images, on y voit ceux qui seraient parmi les premiers hommes à avoir migré d'Afrique en Asie et qui ont vécu jusqu’aux années 90 en paix dans les îles Andaman, en Inde, accepter de danser généralement nu pour amuser les touristes. De quoi ravir les vacanciers qui n’attendent qu’une chose : découvrir la tribu qui vivait jusque-là reclus.

240 euros en échange d’une danse tribale

Enfants et femmes se prêtent au jeu, poussés par les demandes d’officiers de police qui intiment l'ordre en leur disant "danse". Mais cela ne se fait pas naturellement : au début de la vidéo, on entend l’un d’eux rappeler aux membres du groupe tribal "je vous ai donné la nourriture". C’est alors que certains se mettent à effectuer quelques pas et poussent la chansonnette, sous les applaudissements des touristes.

D’après le journal, les fonctionnaires ne servent pas simplement de guides, ils reçoivent également des pots de vins pour ravir les voyageurs. Et ce, alors qu’ils se doivent - en théorie - de protéger les tribus du monde extérieur.

D’après un guide qu’a rencontré The Observer, pour faire pénétrer les touristes dans la réserve des Jarawa, les officiers recevraient en moyenne 200 livres sterling, soit environ 240 euros. Pire : ce serait les officiers qui auraient appris à la tribu à mendier.

Des bananes sont jetées pour les attirer

A en croire le journal britannique, qui dit être allé voir de ses propres yeux ce qu’il en est, des centaines de voitures touristiques arpentent la réserve chaque jour. Et ce alors que huit convois seraient autorisés officiellement à se rendre au sein de la réserve.

Seul objectif des voyageurs : apercevoir des Jarawa. Et visiblement les panneaux à l’entrée interdisant les photos, les films ou le moindre contact avec la tribu n’empêchent rien. The Observer l’affirme : "quand les portes s’ouvrent, les flashs des appareils photo commencent à crépiter et les touristes lancent des bananes et des biscuits sur la route pour tenter d’attirer les membres de la tribu". Comme au zoo.

"On  ne peut pas les traiter comme des bêtes"

Depuis la diffusion de cette vidéo, les critiques fusent. Le ministre indien des Affaires tribales, V. Kishore Chandra Deo, a ordonné mercredi l'ouverture d'une enquête. "C'est déplorable. On ne peut pas traiter des êtres humains comme des bêtes de foire pour se faire de l'argent. Je désapprouve totalement ce genre de tourisme et nous allons l'interdire".

"Il est assez clair que l'attitude de certaines personnes envers les populations tribales n'a pas changé d'un iota. Les Jarawa ne sont pas des animaux de cirque que l'on fait danser sur commande", a commenté Stephen Corry, le directeur de Survival International, qui milite pour le droit des tribus dans le monde.

Reste que des doutes sont possibles sur la datation de cette vidéo.  "Avant le tsunami de 2004, les gens auraient pu les forcer à danser (...). Depuis le tsunami, une politique de grande autonomie avec un minimum d'intervention a été mise en place. Les choses se sont un peu amélioré, il y a un grand soin (apporté à la sécurité) maintenant", a ainsi assuré un anthropologue indien, A. Justin, qui travaille sur les îles Andaman.

La police des îles Andaman s’est défendu assurant que c'était un "vieil" enregistrement. "La vidéo semble vieille de six ou sept ans, lorsque les Jarawa ne s'habillaient pas. Aujourd'hui, ils s'habillent en public", a relevé le directeur général de la police, Samsher Deol. Quoi qu’il en soit, la police a ouvert une enquête pour connaître l'identité du vidéaste et de ceux qui ont payé et reçu le pot-de-vin.