La délicate cueillette du Yarsagumbu

© ERIC VALLI
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Pendant trois mois, un réalisateur français a suivi les Népalais sur les hauteurs de l’Himalaya.

Pour Noël, France 5 invite le téléspectateur au voyage. Dimanche, à 18 heures, la chaîne publique emmènera le téléspectateur à l’autre bout du monde, sur les hauteurs de l’Himalaya, entre 3.500 et 5.000 mètres. Sur ces pentes, chaque année, des centaines de milliers de petites mains traquent une espèce rarissime : le Yarsagumbu, une plante-animal, mi-chenille, mi-champignon.

Eric Valli et son cameraman ont suivi pendant trois mois les acteurs de cette incroyable aventure humaine, qui vide "à 95%" les petites villes situées au pied de l'immense montagne. "Seules les personnes âgées restent au village, à tel point qu'il n'y a plus personne pour incinérer les morts", raconte le réalisateur.

Les deux hommes ont grimpé avec les Népalais, leurs femmes et leurs enfants, de mai à juillet. Une période, comme on le voit à l'image, difficile à 5.000m d'altitude. "Les conditions étaient très dures", se rappelle Eric Valli. "Jusqu'en juin, il y a eu beaucoup de neige, des tempêtes. Il a fait froid très tard, et dès 6 heures du matin on était reparti". Les deux hommes ont perdu 5 et 9 kilos. "Chaque jour, on est un peu moins rapide, moins réactif".

Un an de salaire

Au menu de ces "chercheurs d'or" de l'Himalaya, des heures et des heures, courbés, avalant 1.000 à 1.500 m de dénivelé dans la journée pour repérer la petite tige au milieu des feuillages et la cueillir. Les bons jours, ils peuvent en récolter une trentaine, les mauvais… aucun. "Un bon récolteur peut se faire en quelques semaines le salaire d'un an, voire plus", estime Eric Valli. "Pour cette population, c'est le seul moyen de faire de l'argent. Le reste, ils le troquent".

De plus en plus rare, le Yarsagumbu suscite la convoitise. Le réalisateur s'attarde, caméra en main, sur ceux qui se sont fait dérober leur butin, ou se l'ont fait piquer aux dés, le soir dans les tentes. Il constate également l'"amateurisme" des troupes qui partent à l'assaut des hauteurs, parfois simplement vêtues de jogging ou de vestes. "16 personnes sont mortes il y a deux ans", souligne-t-il. "Il y a aussi eu sept meurtres dans la vallée".

Jusqu'à 50.000 euros le kilo

Pourquoi cette plante-animal unique au monde attire-t-elle autant de monde ? Parce qu'elle est plus chère que l'or, nous apprend le documentaire, qui passe aussi beaucoup de temps dans les pas des revendeurs à Hong-Kong. "Le kilo se monnaye jusqu'à 50.000 euros", affirme le réalisateur. "Avant, elle était réservée aux empereurs chinois, mais l'émergence de nouveaux-riches a explosé la demande depuis quelques années. Résultat, le prix a été multiplié par vingt en dix ans".

yarsagumbu

© ERIC VALLI

Surnommé "Himalaya's viagra", le Yarsagumbu est réputé pour ses vertus aphrodisiaques. Mais c'est surtout, pour les Chinois, un élixir de jeunesse. "En Chine, si vous voulez faire plaisir à quelqu'un, le Yarsagumbu est un cadeau idéal. Il se sert en soupe, avec la tortue, macéré dans de l'alcool avec du Cointreau, en poudre ou en gelée", précise Eric Valli. Le réalisateur y a goûté il y a quelques années, "à l'époque où il était beaucoup moins cher". Conclusion : "ça a le goût de champignon".