L’enquête sur l’attentat de Karachi en 2002 prend une tournure de plus en plus politique. Les révélations de l'ex-ministre de la Défense Charles Millon sur les ventes d'armes au Pakistan relancent les interrogations sur le financement de la campagne d'Edouard Balladur en 1995.
Les noms de Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy, Edouard Balladur et Dominique de Villepin apparaissent à plusieurs reprises. Quel aurait été leur rôle ?
Jacques Chirac coupe les robinets. Lorsqu’il devient président de la République, Jacques Chirac est informé que la France verse des commissions à plusieurs acteurs ayant “facilité“ la signature d’un important contrat avec le Pakistan pour construire des sous-marins militaires.
Ces commissions ne paraissant pas justifiées, il ordonne à son ministre de la Défense, Charles Million, de mettre fin au versement. En coupant ce robinet financier, la France pourrait s’être attiré les foudres de plusieurs intermédiaires, dont des haut-gradés pakistanais soupçonnés d’avoir joué un rôle dans l’attentat de Karachi.
Edouard Balladur aurait bénéficié de rétrocommissions. Chargé de l’enquête sur l’attentat, le juge Renaud Van Ruymbeke suspecte qu’une partie de commissions versées à des intermédiaires aurait pu être reversées en France pour financer la campagne présidentielle d’Edouard Balladur. En clair, des responsables français auraient sciemment gonflé ces commissions pour en récupérer une partie, c’est ce qu’on appelle des rétrocommissions.
Bien qu’il nie de telles accusations, Edouard Balladur n’a d’ailleurs pas pu justifier l’origine de certains fonds ayant financé sa campagne. Libération évoque un versement de 10 millions de francs (1,5 millions d’euros). Jacques Chirac aurait eu d’autant moins de scrupules à stopper le versement de commissions qu’Edouard Balladur était alors son principal rival, ayant provoqué un schisme au sein du RPR.
Nicolas Sarkozy aurait été au courant. Il était ministre du Budget lors de la signature du contrat pakistanais en 1994. C’est lui qui a validé le montant des commissions, encore légales à l'époque, et donné son feu vert à la création de sociétés offshore par lesquelles transitaient cet argent.
C’est donc un acteur central qui a participé à la mise en place d’un système financier qui aurait pu permettre de faire revenir de l’argent en France. De plus, il était le porte-parole d'Edouard Balladur lors de la campagne présidentielle en 1995, ce qui alimente les soupçons de rétrocommission à usage électoral.
Dominique de Villepin, bras droit de Chirac. En 1995, l’ancien Premier ministre est secrétaire général de l'Elysée, c’est-à-dire l’homme de confiance de Chirac. Il était donc régulièrement informé par le ministère de la Défense et les services de renseignement sur ces fameuses commissions. C’est donc un acteur incontournable, très au courant de cette affaire.
Alain Juppé, Premier ministre à l'époque. Le maire de Bordeaux est le Premier ministre de Jacques Chirac en 1995, lorsque celui-ci a décidé de mettre fin au versement des commissions. Les familles des victimes réclament son audition par la justice, espérant qu'il puisse donner des précisions sur ce que savait le gouvernement lorsqu'il a pris sa décision.