Un pas en avant, deux pas en arrière. Le droit de vote des étrangers, promesse emblématique du candidat Hollande, est aujourd'hui repoussé aux calendes grecques. Les étrangers non communautaires ne sont donc pas près d'élire leur maire. Voici pourquoi.
>>> 2013, 2014, jamais ?
Pendant la campagne présidentielle, dans l'entre-deux-tours, François Hollande avait réaffirmé son 50e engagement, promettant une réforme du droit de vote des étrangers avant les municipales de mars 2014. "Il n'y a pas d'échéance particulière, mais je dirai en 2013, avant les élections de 2014, puisqu'il y a des élections locales qui sont prévues en 2014", avait assuré le candidat socialiste, répondant ainsi aux doutes de son ex-compagne, Ségolène Royal. Le 19 septembre, Jean-Marc Ayrault en personne avait confirmé le calendrier, assurant qu'un projet de loi serait présenté en 2013.
Un mois après, le calendrier n'est plus du tout le même. Invitée de Radio Classique, mardi, la porte-parole du gouvernement, Najat Vallaud-Belkacem, a reconnu à demi-mots, que la réforme ne serait pas présentée au Parlement en 2013, contrairement à ce qu'avait affirmé le Premier ministre. Interrogée sur la possibilité que la réforme soit en vigueur pour les élections municipales de 2014, qui est la prochaine grande échéance, la porte-parole du gouvernement a fait part de ses propres "doutes". "J'avoue avoir quelques doutes parce que cela signifierait que nous adoptions le texte d'ici le printemps 2013", a-t-elle reconnu.
>>> Pourquoi ce report du calendrier ?
Le gouvernement est aujourd'hui face à une impasse. Faire passer la réforme par la voie d'un référendum est jugé trop risqué politiquement. Surtout que les Français y sont de moins en moins favorables. Selon un sondage Ifop publié en septembre, seuls 39% des personnes interrogées se déclaraient favorables à la mesure, contre 55 % en décembre 2011. "La situation est devenue plus compliquée, le pays s’est crispé sur la question", reconnaît l'entourage de François Hollande, interrogé par Libération.
Du côté parlementaire, le risque d'échec est aussi maximal. Le droit de vote des étrangers nécessite une réforme de la Constitution. Or, le gouvernement ne dispose pas aujourd'hui d’une majorité des trois cinquièmes pour la faire adopter en Congrès à Versailles. Pour l’heure, à gauche, seules 521 voix seraient assurées sur les 555 nécessaires pour l’adoption du texte.
"Aujourd’hui, on peut très bien décider de soumettre la loi au vote, mais on est assuré d’échouer. On ne va pas y aller juste pour se donner bonne conscience. Ce serait absurde", a confié un ministre à Libération. Jean-Marc Ayrault ne dit pas autre chose. "Les parlementaires de gauche devront trouver des alliés au centre et à droite pour faire adopter le texte", a rappelé mercredi le Premier ministre. En attendant, l'UMP jubile. Sa pétition contre le droit de vote des étrangers totalise aujourd'hui 187.020 signataires.