"Mettre en route" avec un énorme braquet n'est pas chose facile. Le jeune Britannique d'origine allemande Philip Hindes, premier relayeur au sein du team GB, en a encore fait la démonstration, jeudi, lors des qualifications de la vitesse par équipes. Sa roue avant s'est dérobé à plusieurs reprises et Hindes a chuté au sol. Ses deux coéquipiers, Chris Hoy et Jason Kenny, de vieux "routiers" de la piste, ont immédiatement levé les bras pour signaler un "faux" départ. Dans ce cas, le règlement exige d'en donner un second. Quelques secondes plus tard, l'équipe britannique réalisait le meilleur temps des séries avant de décrocher l'or et le record du monde face à la France en fin d'après-midi.
Hindes fait exprès de chuter :
Problème, Hindes, d'une incroyable naïveté, a révélé le pot aux roses : il avait fait exprès de chuter, histoire de ne prendre aucun risque. "Ma roue avant a glissé et je n'ai pas pris un départ optimal", a déclaré Hindes, qui a intégré l’équipe britannique en 2011 après avoir porté les couleurs allemandes. "On en avait discuté avant et on avait dit qu'il fallait tomber si ça se présentait. Je l'ai fait exprès pour obtenir un autre départ." L'entraîneur tricolore, Florian Rousseau, avait tout de suite deviné la supercherie. "Il loupe techniquement son départ en faisant sauter par deux fois sa roue avant. Après, il joue très bien le coup en faisant exprès de tomber pour que les commissaires considèrent que c'est un faux départ. Sinon, il savait qu'il allait faire un mauvais temps."
Une deuxième chance pour faire le meilleur temps
Si Hindes avait poursuivi son parcours, la Grande-Bretagne se serait sûrement qualifiée parmi les huit meilleures équipes (sur 10) mais n'aurait peut-être pas réalisé le meilleur temps, ce qui lui aurait sans doute compliqué la tâche sur la route de la finale. "En regardant attentivement la vidéo, on s'est douté qu'il avait chuté exprès", a déclaré la DTN du cyclisme français, Isabelle Gautheron. "Mais il n'y pas dans le règlement de possibilité de sanction à partir de ce qu'on voyait. (...) Maintenant qu'il en a parlé, peut-être doit-on reconsidérer les règles."
L'Union cycliste internationale (UCI) s'est contentée de confirmer le résultat de la compétition, sans s'exprimer sur l'affaire. Hindes (ici au centre, photo) pourrait être amené à comparaître devant la commission éthique de l'UCI si la fédération internationale décide de se saisir du cas. De son côté, la fédération britannique a déjà affûté la défense éventuelle de son athlète en évoquant un problème de... "traduction".
Hindes, né en Rhénanie-du-Nord-Westphalie en 1992, courait encore l'Allemagne aux championnats du monde juniors 2010. Mais il a profité d'un changement de règlement de l'UCI pour ne pas attendre trois ans avant de représenter la Grande-Bretagne, le pays de son père. La fédération britannique a expliqué que Hindes n'avait commencé à apprendre l'anglais qu'en octobre 2010.
Les observateurs sont sceptiques devant les explications britanniques. Et de nombreux commentateurs, dont Patrick Chassé, établissent un parallèle entre cette chute intentionnelle et le refus de jeu des huit joueuses de double de badminton, exclues du tournoi pour leur comportement. Y aurait-il donc deux poids deux mesures ?
Reste qu'il est sans doute plus facile d'exclure quatre équipes au cours d'un tournoi de double féminin de badminton que de revenir sur le classement d'une épreuve qui a vu la victoire de la Grande-Bretagne devant la famille royale presque au complet...