Nouriel Roubini se félicite des dernières prises de position de Mario Draghi, au moment où la BCE tient une réunion cruciale, ce jeudi. Pour l'économiste américain, qui signe ce matin une chronique dans 'Les Echos', le président de la BCE semble décidé à lancer un programme de "Draghinomics", sur le modèle des "Abenomics", le plan anti-déflation et pro-croissance japonais mis en oeuvre depuis novembre 2012 par le Premier ministre nippon Shinzo Abe. Ce dernier a travaillé main dans la main avec le gouverneur de la banque centrale, Haruhiko Kuroda, pour mener une politique articulée autour de trois "flèches" : une politique budgétaire expansive (sujet en vif débat actuellement en Europe), une politique monétaire non conventionnelle ultra-accommodante et des réformes structurelles. Les trois flèches des "Draghinomics" En tant que président de banque centrale, Mario Draghi n'est toutefois aux commandes que d'un seul de ces trois leviers (la politique monétaire), les deux autres (politiques budgétaires et réformes structurelles) étant de la compétence des Etats européens, qui divergent sur la marche à suivre. Le 22 ao�"t dernier, M. Draghi s'est cependant avancé sur ce terrain en conseillant aux Etats de pratiquer des ajustements de politiques budgétaires, au moment où certains pays (France, Italie) réclament moins de rigueur et plus de relance. Soulignant qu'au Japon, les "Abenomics" n'ont pas encore totalement porté leurs fruits en raison du manque de réformes structurelles, Nouriel Roubini estime que "comme au Japon, il est nécessaire de déployer chacune des trois flèches constituant les "Draghinomics" si la zone euro entend peu à peu retrouver compétitivité, croissance, création d'emplois, ainsi que viabilité de la dette à moyen terme dans les secteurs privé et public". Berlin a des marges de manoeuvre budgétaires L'économiste préconise que la BCE lance un grand programme de rachat d'obligations d'Etat (un sujet qui fâche l'Allemagne) et encourage des ajustements budgétaire dans les pays qui peuvent se permettre financièrement une relance, à commencer par l'Allemagne, qui affiche un large excédent budgétaire. Un appel que Berlin s'est jusqu'ici refusé d'entendre, refusant de lâcher du lest sur sa politique budgétaire ultra-orthodoxe, et prônant la poursuite d'une rigueur sans faille face à la dette publique. Mario Draghi devra aussi continuer à faire valoir que l'efficacité du "QE" (assouplissement quantitatif) "exige que les gouvernements appliquent plus rapidement un certain nombre de réformes structurelles du côté de l'offre, et veillent à un juste équilibre entre une certaine souplesse budgétaire à court terme et une austérité à moyen terme", conclut Nouriel Roubini, qui s'était rendu célèbre en prévoyant la crise des "subprimes" de 2008 aux Etats-Unis.