Des éleveurs perturbaient toujours mardi pour la deuxième journée consécutive la circulation, principalement en Normandie mais aussi en Bretagne, dans le Sud-Ouest et en Picardie. Le mouvement s'est poursuivi dans la soirée, en attendant l'annonce de mesures. Et pour mercredi ? "Pas de raison de lever les barrages", a déclaré Xavier Beulin, président de la FNSEA, mardi dans la soirée, après une rencontre avec le ministre de l'Agriculture, Stéphane Le Foll.
Ce dernier avait finalement décidé de se rendre mardi après-midi en Normandie, principal foyer de mobilisation des éleveurs, sans attendre de les recevoir à Paris, comme initialement prévu. Il s'est même "excusé" d'avoir "pris un peu de temps" avant de rencontrer les représentants locaux des manifestants. Le ministre a regagné Paris en soirée pour prendre connaissance, en compagnie des syndicats nationaux, d'un rapport sur les prix et les marges, très attendu, du médiateur qu'il a désigné et dont la remise a été avancée de 24 heures pour endiguer la crise.
Le président de la République et le Premier ministre ont par ailleurs annoncé mardi matin la présentation mercredi d'un plan d'urgence en Conseil des ministres.
Les infos essentielles :
- Les éleveurs en colère ont étendu leur blocage
- Hollande a annoncé qu'un "plan d'urgence" serait présenté mercredi
- Le Foll a rencontré les éleveurs à Caen mardi après-midi
- Le rapport sur la crise du secteur a été remis avec 24h d'avance
Le Foll s'est finalement rendu à Caen. Pressé par les éleveurs, le ministre de l'Agriculture Stéphane Le Foll a annoncé qu'il se rendrait à Caen mardi après-midi pour rencontrer les responsables des éleveurs. Arrivé en hélicoptère, dans un quartier entièrement bouclé par les CRS, le ministre a rejoint la Préfecture sans encombre. Une rencontre directe avec une délégation d'éleveurs s'est tenue. "J'ai pris un peu de temps et je m'en excuse auprès des professionnels agricoles", a-t-il reconnu. "Il faut que les aides aillent aux exploitations qui ont des difficultés de trésorerie", a-t-il ensuite annoncé à l'issue de la réunion. "Les demandes étaient claires : faire respecter l'accord sur les prix. Je vais rentrer à Paris et me mettre au travail".
Un rapport crucial remis en avance. Le ministre a regagné Paris en soirée pour prendre connaissance d'un rapport sur les prix et les marges, très attendu, du médiateur qu'il a désigné et dont la remise a été avancée de 24 heures pour endiguer la crise.
Ce rapport, commandé à l'issue d'une table ronde de la filière bovine le 17 juin, traite spécifiquement des prix de la viande bovine et du rôle des intermédiaires (industrie et distribution). Il sera scruté de très près par les professionnels et les autorités pour déterminer qui, de la grande distribution ou des industriels des abattoirs, manque à sa parole et refuse d'appliquer des hausses de tarifs convenues. Ce rapport ne concerne pas les prix du lait. Mais "clairement", a jugé Stéphane Le Foll, la filière est en crise: "302 à 304 euros la tonne, c'est insuffisant".
Les blocages s'étendent. Sur le terrain, les éleveurs normands avaient étendu leurs blocages mardi pour la 3e journée de mouvement, bloquant l'accès à Caen, à Evreux, au Mont-Saint-Michel et aux ponts de Normandie et de Tancarville. Les manifestants ont aussi élevé des barrages sur plusieurs routes ou autoroutes de la région.
Les blocages se sont par ailleurs propagés à la Bretagne, vers Saint-Malo et Brest, au sud-ouest autour de la grotte de Lascaux et en Picardie. Les éleveurs de Rhône-Alpes s'apprêtaient à rejoindre le mouvement mercredi, prévoyant des barrages filtrants dans la Loire. Pour Jean-Pierre Royannez, président de la FRSEA Rhône-Alpes, la sécheresse vient de plus s'ajouter à la baisse des prix de la viande das la région.
La rencontre à Caen avec Stéphane Le Foll n'a-t-elle rien changé ? "L'échange avec le ministre a été intéressant. Je ne trahirai pas ces discussions. Je vais commencer à aller rendre compte des échanges qu'on a eu", a fait savoir Jean-Yves Heurtin président de la FDSEA du Calvados, avant de proposer de "maintenir les blocages" en attendant d'éventuelles annonces. Il n'y a "pas de raison de lever les barrages" des éleveurs, qui pourraient même s'étendre à d'autres régions mercredi, a renchéri mardi soir Xavier Beulin, président de la FNSEA, après une réunion au ministère de l'Agriculture.
Un plan d'urgence mercredi. Plus tôt dans la journée, François Hollande avait annoncé qu'un "plan d'urgence pour les éleveurs" serait présenté mercredi en Conseil des ministres. Qu'y aura-t-il dedans ? A la sortie d'une réunion mardi midi, Stéphane Le Foll avait annoncé une rencontre avec les banques dans l'après-midi pour alléger "l'endettement sur les remboursements d'annuités chez beaucoup d'éleveurs". Encore plus tôt, le ministre de l'Agriculture, avait annoncé "des mesures spécifiques pour l'élevage". "Je demande aujourd'hui à ce que les 23 millions d’euros mis en mouvement depuis le 30 février dans tous les départements, soient réévalués en fonction de la situation de difficulté que connaissent concrètement des exploitations agricoles", avait-il détaillé sur France 2. "Il y aura des aides spécifiques pour l’élevage, il y aura aussi une politique à structurer au niveau de l’exportation [...] pour répondre à la demande qui nous est faite : que l’on trouve des marchés et que l’on solutionne globalement le problème de l’élevage aujourd’hui", a-t-il ajouté.
Que demandent les éleveurs ? Ils s'indignent des prix de vente au consommateur de leurs productions, jugés trop faibles pour qu'ils puissent en vivre. Le prix du lait a ainsi chuté de plus de 15% sur un an. Quant aux montants versés aux producteurs pour la viande bovine, ils n'ont pas significativement augmenté ces derniers mois. "Il faut que Stéphane Le Foll vienne traîner ses bottes dans les exploitations agricoles (...) et fasse respecter les accords du 17 juin" avec la grande distribution, estime le président de la FDSEA du Calvados, Jean-Yves Heurtin.