Une étrange campagne de publicité s’affiche depuis la semaine dernière sur 1.939 panneaux en France, dénonçant la "casse" dont est victime le fret ferroviaire en France. “Tous les jours on tue le fret“, dénoncent les affiches, qui ont été financées par le comité central d’entreprise (CCE) de la SNCF.
La branche fret de la SNCF se porte mal : hors filiales privées, elle a perdu 600 millions d'euros en 2010 pour un chiffre d'affaires d'un milliard. Le virage écologiste décrété par le gouvernement lors du Grenelle de l’Environnement ne s’est toujours pas traduit par un boom du transport de marchandises par voie ferroviaire. D’où cette campagne inédite, qui pose deux questions : son financement est-il légal ? Ne constitue-t-elle pas une publicité déguisée pour la CGT ?
Un financement illégal ?
Le Figaro, qui a sorti l’affaire mercredi, a pointé du doigt la légalité d’une telle campagne, financée par le CCE. Or les comités d’entreprises sont surtout connus pour leurs œuvres sociales au bénéfice des employés, comme l’offre de chèques vacances subventionnés ou l’achat de cadeaux de Noël pour les enfants des salariés.
Mais le CCE a également une mission de suivi de la situation économique de l’entreprise. Il peut donc commander des audits et des enquêtes internes, mais aussi des campagnes de publicité. La campagne en question est donc légale, c’est plus sa dimension électorale qui irrite les différents syndicats de la SNCF.
Une campagne aux allures très cégétiste
Les prochaines élections syndicales ont en effet lieu le 24 mars prochain. Or, l’affiche reprend la typologie et les visuels habituellement utilisés par la CGT dans ses tracts : phrase choc, couleur rouge et police de caractère identique. De là à y voir une campagne déguisée pour le principal syndicat, il n’y a qu’un pas, d’autant que la CGT est majoritaire au sein du CCE de la SNCF.
Les autres syndicats ne commentent pas officiellement cette affaire, d’autant qu’ils ont tous approuvé la campagne. Mais en interne, le malaise est palpable, car aucune organisation n’avait vu le visuel avant sa diffusion.
La gêne des autres syndicats
“Il y a effectivement des tentatives par les uns et par les autres, de porter leur discours. Sur le visuel, effectivement on regrette de n’avoir pas pu être suffisamment associé, pour avoir une campagne plus homogène et la plus unitaire possible“, explique diplomatiquement Alain Cambi, secrétaire fédéral de Sud Rail.
La SNCF, qui voit dans cette campagne une critique de l’entreprise, a porté plainte pour dénigrement et atteinte à son image. Le procès, qui débute vendredi, se fera sans la CFDT, qui a décidé de se désolidariser des autres syndicats. Une manière détournée de dénoncer les manières peu aimables de la CGT.