EDF n'avait probablement pas besoin de cela. Obligée de prolonger l’arrêt de plusieurs réacteurs nucléaires pour effectuer de nouveaux contrôles, l’entreprise française va ainsi produire moins d’électricité que prévu. Et donc gagner moins d’argent qu’espéré, un manque à gagner qui dépasserait le milliard d’euros, selon le quotidien Les Echos. Cette perte rallonge un peu plus la longue liste des soucis que rencontre EDF depuis plusieurs années.
EDF empêché de redémarrer plusieurs réacteurs. La fin de semaine dernière a été difficile pour EDF. Malgré ses demandes insistantes, l’entreprise a annoncé vendredi ne pas avoir été autorisée par l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) à redémarrer plusieurs réacteurs actuellement à l’arrêt. Les installations nucléaires de Bugey 4, Gravelines 2, et Tricastin 1, 3 et 4 vont donc rester inactives jusqu’à la fin décembre.
Or, EDF a besoin de relancer ces réacteurs puisqu’au total un tiers de ses 58 réacteurs nucléaires sont actuellement à l’arrêt au moment où les températures baissent et que la demande en électricité augmente. EDF va donc produire moins d’électricité, à destination du marché français mais aussi pour les pays voisins : attendue à 380-390 térawattheures pour l’année 2016, sa production devrait finalement s’établir à 378-385 térawattheures. Dit autrement, cela représente un manque à gagner de plus d’un milliard d’euros.
Pourquoi EDF a-t-il arrêté plusieurs réacteurs ? La mise en pause de certaines centrales est une procédure classique et nécessaire pour y mener des contrôles de sécurité. Mais le nombre de réacteurs à l’arrêt est bien plus élevé que d’habitude, EDF étant rattrapée par les négligences d’Areva et de son usine du Creusot. Après avoir décelé un défaut dans la composition de l'acier de la cuve du futur EPR de Flamanville, l’ASN a décidé de mener des investigations plus poussées. Le résultat est accablant : depuis des décennies, Areva fournit des pièces ne respectant pas le cahier des charges et pouvant mettre en danger le fonctionnement normal de nombreuses centrales nucléaires. Le président de l'ASN est même allé jusqu’à évoquer "des falsifications", une accusation grave dans un secteur censé tout faire pour s’approcher du risque zéro.
Le gendarme de la filière nucléaire a donc sommé Areva de vérifier toutes les pièces fabriquées sur son site du Creusot, mais a également demandé à EDF de contrôler toutes les centrales dans lesquelles de telles pièces ont pu être installées. Après avoir effectué les vérifications demandées, EDF a estimé qu’il n’y avait pas de risque et qu’il pouvait relancer les réacteurs à l’arrêt mais l’ASN ne partage pas cette sérénité : il a demandé à l’électricien d’effectuer des contrôles supplémentaires, retardant un peu plus le retour à la normale de la production française.
Un souci de plus pour l'électricien. Ces nouveaux contrôles imposés par l’ASN seraient un problème secondaire pour EDF si cette dernière n’était pas par ailleurs confrontée à toute une batterie de soucis, au premier rang desquels la dette accumulée par l’entreprise : cette dernière avoisine officiellement les 37 milliards d’euros mais certaines analyses avancent le chiffre de 100 milliards d’euros.
Lestée par cette lourde dette, EDF va en plus devoir débourser des milliards au cours des prochaines années : entre 50 et 100 milliards d’euros pour prolonger la durée de vie des centrales actuelles dans le cadre du plan de Grand carénage, et au moins 21 milliards pour financer l’EPR d’Hinkley Point, au Royaume-Uni. Sans oublier le coût encore incertain, mais qui se chiffrera en milliards, du démantèlement des centrales nucléaires les plus anciennes. Et pour ne rien arranger, le chantier de l’EPR de Flamanville accumule les retards et les malfaçons, alourdissant un peu plus la facture finale. Autant dire qu’EDF a grandement besoin d’argent frais et donc de faire fonctionner le plus de centrales.