"Ni de gauche ni de droite", voilà comment Emmanuel Macron qualifie sa candidature à l’élection présidentielle. En réalité, il serait plus juste d’affirmer qu’il est à la fois de droite et de gauche. Une dualité qui se retrouve dans ses soutiens : le centriste François Bayrou, le socialiste Christophe Caresche, l’écologiste socialiste François de Rugy, l’élue Les Républicains Aurore Bergé, l’ex-directeur de campagne de Bruno Le Maire, Jérôme Grand d’Esnon…
Sans surprise, le programme dévoilé jeudi est également marqué par cet entre-deux revendiqué par le prétendant à l’Élysée. A l’image du slogan présenté lors du discours de la Porte de Versailles, "Libérer la France et protéger les Français", sur le plan économique, Emmanuel Macron emprunte à la fois à la droite et à la gauche. Europe 1 fait le tri.
Ce qu’il pique à la droite
Allègement de charges. Emmanuel Macron insiste régulièrement sur la nécessité de libérer les entreprises des charges qui pèsent sur elles. Un diagnostic partagé par François Fillon et Marine Le Pen. Tous les trois proposent donc de transformer le Crédit impôt compétitivité emploi (CICE) en allègements de charge pérennes. Pour le candidat d’En Marche !, cela se traduirait par une réduction des charges patronales à hauteur de 6 points pour toutes les entreprises.
Accords d'entreprise. Toujours concernant les entreprises, Emmanuel Macron souhaite, comme il l’affirme dans Le Parisien, "déconcentrer l’organisation de la vie économique et sociale au niveau de la branche et de l’entreprise". Cette volonté de ne plus fixer depuis l’Élysée une même règle pour tous afin de donner plus de flexibilité aux entreprises figure également au programme de François Fillon.
Favoriser le retour à l'emploi. Candidat auto-déclaré du travail, Emmanuel Macron n’oublie pas le chômage. Comme François Fillon, il veut inciter plus fortement les chômeurs à reprendre un emploi. Tous deux prônent des méthodes différentes. Avec l’ancien ministre de François Hollande, les demandeurs d’emploi ne pourront pas refuser plus de deux offres correspondant à leurs qualifications et présentant une rémunération au pire inférieur à 25% à celle de leur ancien poste. Autrement, leurs indemnités chômage seront suspendues. François Fillon plaide plutôt pour une dégressivité temporelle des allocations afin de favoriser le retour à l’emploi.
Retraites. Emmanuel Macron compte s’attaquer au système des retraites en créant un régime universel. Fini les 37 régimes actuels, place aux mêmes règles pour tout le monde. Ce qui implique un alignement du calcul des pensions de retraites du public sur le privé. François Fillon propose lui aussi un tel alignement.
Fonctionnaires. La question des suppressions de postes dans la fonction publique était au cœur des débats de la primaire de la droite. Le vainqueur, François Fillon, avance le chiffre de 500.000 fonctionnaires en moins sur cinq ans. Un dégraissage massif qui doit permettre de rééquilibrer le budget de la France. Emmanuel Macron partage le constat de la droite mais ne va pas aussi loin avec une proposition de 120.000 postes supprimés.
Dépenses publiques. Plus globalement, Emmanuel Macron s’entend avec la droite concernant la nécessaire baisse des dépenses publiques. Le candidat d’En Marche ! a préparé un plan de 60 milliards d’euros d’économies sur cinq ans, dont 25 milliards pour l’État central. C’est toutefois moins que François Fillon et ses 100 milliards d’euros.
Ce qu’il pique à la gauche
Retraites (bis). Concernant les retraites, Emmanuel Macron pioche également du côté de la gauche en s’engageant à ne pas modifier l’âge de départ à la retraite et le niveau des pensions pendant son quinquennat. Contrairement à la droite, le candidat d’En Marche ! et le socialiste Benoît Hamon considèrent que l’équilibre est possible avec le seuil de 62 ans et 42 ans de cotisation. Jean-Luc Mélenchon va plus loin en proposant un retour à 60 ans.
Taxe d'habitation. C’est sa mesure phare pour le porte-monnaie des Français : Emmanuel Macron veut exonérer de taxe d’habitation 80% des ménages. Soulager les propriétaires et les locataires de ce poids était déjà une volonté de François Hollande. Sous son mandat, une réforme du système actuel a été tentée à deux reprises pour rendre la taxe d’habitation plus progressive. Sans succès.
Contrats courts. Emmanuel Macron veut instaurer un système de bonus/malus pour inciter les entreprises à recourir au CDI en lieu et place des contrats courts. Une volonté de responsabiliser les entreprises aussi revendiquée par Benoît Hamon. Le candidat du PS propose, lui, de moduler le taux d’imposition des sociétés en fonction des efforts faits pour l’investissement et l’emploi.
Relance économique. Comme Jean-Luc Mélenchon, Emmanuel Macron croit à la politique de relance. L’ancien ministre de l’économie propose un plan d’investissement de 50 milliards d’euros, dont 15 milliards pour la formation des jeunes et 15 milliards pour la transition écologique. Dans la même veine, le candidat de la France insoumise souhaite un plan de 102 milliards, notamment pour faire face aux urgences sociales et environnementales.
Transition énergétique. Enfin, sur l’environnement, Emmanuel Macron avance des mesures comparables à celles des candidats de gauche mais avec un calendrier plus étiré. Il promet de rénover un million de logements mal isolés, une préoccupation chez Benoît Hamon. Le candidat d’En Marche ! veut également augmenter à 32 % la part des énergies renouvelables d'ici à 2030, tout en réduisant celle du nucléaire de 75 % à 50 % à l'horizon 2025. Benoît Hamon prône de son côté 50% d’énergies renouvelables en 2025 et une sortie définitive du nucléaire en 2050. Jean-Luc Mélenchon prévoit 100% d’énergies renouvelables en 2050.
Candidat de la synthèse
Pour conclure, Emmanuel Macron présente des mesures partagées à droite comme à gauche. Exemples parmi d’autres : l’abaissement de l’impôt sur les sociétés à 25% (comme Fillon et Mélenchon) et le respect d’un déficit budgétaire sous les 3% (promis par Hollande pour l’année prochaine, garanti en milieu de mandat par Fillon et Mélenchon). Un peu de droite, un peu de gauche mais pas vraiment de mesures fortes : Emmanuel Macron propose un programme économique consensuel, sorte de synthèse de ceux de ses rivaux les plus proches.