Les retraités sont-ils vraiment les grands perdants du début de quinquennat d'Emmanuel Macron ? Après la hausse de la CSG et le quasi-gel de leurs pensions, les aînés, déjà descendus dans la rue début juin, ont le sentiment d'être particulièrement mis à contribution pour redresser les finances du pays au détriment de leur propre pouvoir d'achat. "On leur fait les poches", a notamment résumé Xavier Bertrand, président ex-LR des Hauts-de-France, alors même que l'opposition a fait de cette question l'un de ses principaux chevaux de bataille contre Emmanuel Macron. Invités mardi de Wendy Bouchard sur Europe 1, l'économiste Philippe Crevel, directeur du Cercle de l'épargne, et Emmanuel Grimaud, fondateur de Maximis Retraite, démontent dans Le tour de la question les préjugés qui pèsent sur la situation des retraités français.
Les retraités payent plus de CSG que les autres
FAUX. "Un effort a été demandé aux retraités depuis quelques années, soit pas la non-revalorisation des pensions, soit par la CSG supplémentaire. Mais je tiens à préciser que les retraités payent moins de CSG que les actifs. À revenus équivalents, un actif va payer 0,9% de CSG de plus qu'un retraité", assure Emmanuel Grimaud.
"Les retraités, dans leur ensemble, ont un niveau de vie qui est supérieur à la moyenne de la population, à peu près de 3 à 5% en plus. Si l'on regarde au niveau européen, les retraités français sont plutôt bien traités", ajoute Philippe Crevel, qui n'hésite pas à qualifier la période actuelle d'"âge d'or de la retraite" en France.
Les retraités sont très majoritairement propriétaires
VRAI. "75% des retraités sont propriétaires de leur résidence principale, contre 58% pour l'ensemble de la population", relève Philippe Crevel.
"Un locataire consacre 30% de ses revenus à payer son logement. Quand on est propriétaire, il reste la taxe d'habitation – qui va être supprimée d'ici deux ans – et les taxes foncières, mais la situation est plus favorable. Là-dessus, les retraités ont un petit avantage", souligne-t-il. " C'est le fruit de leur travail, et du fait qu'ils ont pu acheter parfois dans de bonnes conditions", en un temps où l'inflation était moins élevée, précise encore l'économiste.
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Les retraités pèsent dans l'économie française
VRAI. "Toutes les études montrent et tous les économistes savent que le niveau de consommation des retraités est très important", insiste Emmanuel Grimaud.
Toutefois, la fragilité du système actuel de financement des pensions menace bien leur pouvoir d'achat sur le long terme. "Il faut replacer les choses dans leur globalité. L'objectif des reformes actuelles est de faire en sorte que les jeunes, qui ont moins de travail et des taux de pauvreté beaucoup plus importants, puissent trouver plus facilement du travail, qu'il y ait un retour de l'activité économique et industriel en France, pour que les retraités puissent encore continuer, pendant dix, quinze ou vingt ans après leur retraite, à consommer", fait valoir l'économiste.
"D’ici le milieu du siècle, on sera 25 millions de retraités. Il faut assurer à tous le moyen de vivre aussi bien que possible, sans tuer ce qui alimente la retraite. Ce sont les cotisations sociales des actifs qui alimentent la retraite. Si le coût du travail est si élevé, qu’il n’y a plus d’emplois possibles, il n’y aura plus de retraites", avertit également Philippe Crevel.
Les retraités sont nécessairement des inactifs
FAUX. "Les gens ne savent pas que le cumul emploi-retraite est possible. Or, il y a 600.000 personnes aujourd'hui, selon les derniers chiffres identifiés mais c'est probablement plus, qui sont au cumul emploi-retraite, c'est-à-dire quasiment un retraité sur trois parmi ceux qui ont liquidé leur retraite ces trois dernières années", indique Emmanuel Grimaud.
"Le cumul emploi-retraite est en train de devenir un phénomène de masse, et pas seulement pour des questions de pauvreté et de revenus, puisqu'il y a une étude très précise qui a été faite et qui montre que seuls 8% des personnes en cumul emploi-retraite le fond par nécessité financière", poursuit le fondateur de Maximis Retraite. "Beaucoup le fond par plaisir, par envie, parce qu'ils sont en forme et qu'ils veulent garder le lien social", détaille encore notre spécialiste. Pour lui, le regard porté sur les seniors dans les entreprises s'est considérablement amélioré ces dix dernières années, notamment en raison d'une pénurie des personnels qualifiés. "La pénurie de main d'œuvre que l'on sent aujourd'hui dans les entreprises est une grande chance pour les retraités. […] Même s'ils quittent leur entreprise à 60 ou 62 ans, on les voit très facilement revenir sur du temps partiel, des prestations de conseil ou de l'intérim".