Le mouvement de grève des chauffeurs routiers risque de se durcir, les négociations entre syndicats et organisations patronales étant dans l'impasse. Les organisations estiment que le refus des chefs d'entreprise de retourner à la table des négociations constituent une "déclaration de guerre". Mais comment ces derniers justifient-ils de ne plus participer aux discussions ? Nicolas Paulissen, délégué général de la Fédération nationale des Transports Routiers (FNTR), a exposé leur point de vue, jeudi matin sur Europe 1.
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Des revendications considérées comme "parfaitement irresponsables". Dénonçant une "smicardisation" de leur profession, les chauffeurs routiers réclament une augmentation salariale de 5% et un treizième mois. "C’est parfaitement irresponsable dans la situation de crise que nous connaissons", leur a répondu Nicolas Paulissen. "De toute façon il n’y a aucun secteur de l’économie française qui accorde des revalorisations à hauteur de 5%. Et je signale que ces 5% ne sont qu’un minimum parce que lorsque vous faites la liste de toutes les revendications d’organisations syndicales, on est plutôt à 10%", a-t-il ajouté.
Et le délégué général de la FNTR d'ajouter : "il y a des réalités économiques qu’il faut prendre en compte et les menaces, les actions revendicatives, ne changeront rien à cette réalité : nos entreprises ne sont pas en capacité aujourd’hui d’aller au-delà de ce qu’elles proposent" :
La FNTR l'assure, les chauffeurs ne sont pas mal payés. "Les salariés du secteur ne sont absolument pas smicardisés : par le biais de l’ancienneté, par le biais des heures supplémentaires ou des heures équivalence qu’ils font, ce sont des salaires éloignés du Smic. Le pouvoir d’achat des conducteurs, comme celui des Français, a évidemment été écorné par la crise. Il y a eu deux facteurs aggravants dans notre secteur : la réduction d’activité qui a amené une réduction des volumes horaires et la refiscalisation des heures supplémentaires", a argumenté Nicolas Paulissen.
Le patronat accusé de ne pas vouloir négocier ? "C’est de l’enfumage". Syndicats et organisations patronales ont donc des points de vue très éloignés. Mais pourquoi avoir refusé de participer à une nouvelle séance de négociations, jeudi au ministère du Travail ? "Tout cela c’est de l’enfumage", a répliqué le délégué général de la FNTR. Avant de préciser : "nous avons reçu hier une invitation émise par le ministère du Travail. Il était indiqué dans cette invitation que si nous venions, nous devions faire d’autres propositions. Or nous ne pouvons pas aller au-delà de ce que nous avons déjà proposé mardi dernier : des augmentations de 1 à 2% en fonction des coefficients et nous avons même élargi nos propositions ne proposant de travailler sur des chantiers de moyen et long termes qui intéressent aussi directement les salariés, les évolutions de la protection sociale, c’est du salaire différé, et les évolutions de nos classifications métiers. (…) Sur les revalorisations salariales, nous ne pouvons pas faire plus".
Le pacte de responsabilité "n’est pas là pour augmenter les salaires". Si les entreprises de transport routier affirment qu'elles n'ont aucune marge de manoeuvre, les syndicats leur rappellent qu'elles ont bénéficié du pacte de responsabilité. Un argument non recevable aux yeux des organisations patronales : "Le pacte de responsabilité est là pour permettre aux entreprises d’embaucher et d’investir, il n’est pas là pour augmenter les salaires puisque son but est bien d’alléger le coût du travail. Nos entreprises exercent leur activité dans une Europe beaucoup plus libéralisée qu’harmonisée, nous sommes concurrencés directement sur le sol français par des transporteurs étrangers aux couts étrangers. Il y a cette réalité qu’il faut prendre en compte", a souligné Nicolas Paulissen.
Et ce dernier de conclure : "les menaces ne changeront rien aux réalités économiques du secteur. Nous avons su préserver l’emploi pendant la crise économique, il faut parfois savoir choisir entre l’emploi et les augmentations salariales".