C’est l’heure des choix pour les communes. Chaque municipalité est en train de finaliser son budget pour l’année 2015 mais doit le faire dans un contexte bien particulier : les dotations de l’Etat à destination des collectivités territoriales sont en baisse de 3,7 milliards d’euros cette année. Résultat, les maires doivent faire des arbitrages pour boucler leur budget, soit en augmentant les impôts, soit en renonçant à certains projets. Mais la contestation monte.
Le contexte : les communes rattrapées par l’austérité. Parce que l’Etat délègue aux collectivités territoriales de nombreuses missions au nom de la décentralisation, ce dernier leur verse chaque année une enveloppe, baptisée dotation globale de fonctionnement (DGF). En 2014, la DGF s'élevait à 40,1 milliards d’euros, auxquels s’ajoutent d’autres dotations et péréquations. Sauf que la France est dans le même temps engagée dans une cure d’austérité et doit réduire la voilure. L’Etat a donc prévu de réduire l'enveloppe de 3,7 milliards d’euros en 2015, soit une baisse de 9,2%.
La première solution : augmenter les impôts. Pour compenser cette coupe, de nombreuses communes ont décidé d’augmenter les impôts locaux, via la taxe d'habitation et la taxe foncière. C’est notamment le cas à Lyon, Strasbourg, Lille, Toulouse, Bordeaux, Marseille ou encore Mulhouse.
A Sceaux, dans les Hauts-de-Seine, le maire UDI Philippe Laurent s’y est aussi résolu : la commune a vu sa dotation réduite de 500.000 euros, sur un budget de fonctionnement de 28 millions d’euros. L’élu a décidé d’augmenter les tarifs de la cantine scolaire, mais seulement pour les familles les plus aisées. Le tarif maximum d’un repas va passer de 6,50 euros à 8,30 euros. "Ce sont des hausses assez importantes, qui font près de 30%. Cela représentera une recette supplémentaire de l’ordre de 100.000 euros sur l’ensemble de l’année. Vous savez, dans les communes il n’y a pas de trésor caché".
L’autre solution : réduire les dépenses. Pour les communes qui se refusent à augmenter la fiscalité, il y a peu d’alternative : réduire les dépenses. De nombreuses communes sont donc en train de renégocier leurs contrats d’eau et de gaz, de réduire la fréquence de nettoyage des rues ou encore de revoir la baisse les subventions accordées aux associations.
Les investissements sont aussi remis en cause. A Gennevilliers, en région parisienne, la municipalité a décidé de geler la construction de nouveaux terrains de football. A Wittenheim, une commune alsacienne de 15.000 habitants, le maire a décidé de repousser un projet culturel, suite à une baisse de la dotation de 240.000 euros, sur un budget total de 21 millions d'euros. "J’avais prévu avec mon équipe de construire une salle culturelle qui fait défaut à Wittenheim. Cela revient à environ 8 millions d’euros TTC. On a donc décidé de le reporter de plusieurs années, encore faut-il que d’ici là nous ne prenions pas de nouvelles baisses", témoigne l’élu Antoine Homé.
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L’association des maires de France se mobilise. Les communes s’adaptent mais à contre-cœur et contestent toujours cette austérité budgétaire imposée par l’Etat. L’association des maires de France se mobilise donc et son président, François Baroin, a rendez-vous jeudi avec Manuel Valls pour évoquer le sujet. Les édiles ne manquent pas d’idées : réduire la baisse de la dotation, l’étaler dans le temps pour la rendre moins douloureuse, ou encore créer un fond d'investissement pour les collectivités.
Un adoucissement de cette cure d’austérité n’est pas pour autant acquis, et pour cause : en octobre 2014, la Cour des comptes taclait sérieusement les collectivités territoriales, accusées de ne réaliser pratiquement aucune économie et de n’équilibrer leurs comptes qu’au prix de hausses de la fiscalité. Et les Sages de la rue Cambon d’estimer que si la réduction des déficits publics avance si lentement, "un tiers du retard" est à imputer aux collectivités territoriales. Dans ce contexte, ces dernières devront se monter très convaincantes pour alléger la cure de rigueur programmée.