L'inflation en France a ralenti au mois de novembre, pour atteindre le niveau extrêmement bas de 0,3% sur un an, après 0,5% en octobre. Mais surtout, les prix à la consommation ont baissé de 0,2% sur un mois, après être restés stables en octobre. L'Insee a également annoncé que l'inflation calculée hors prix volatils et phénomènes conjoncturels, dite "sous-jacente" a été négative pour la première en France. Ce recul fait craindre l'apparition de la déflation, cette baisse durable des prix qui mine l'activité économique. Mais Nicolas Bouzou, économiste et dirigeant du cabinet de conseil Asteres, appelle à ne pas paniquer.
Qu'est ce que c'est, la déflation ?
C'est très simple : c'est la baisse généralisée du niveau des prix sur plusieurs mois. En France et en Europe du Sud, nous y sommes quasiment, contrairement à l'Europe du Nord. Beaucoup d'économistes estiment que la déflation est mauvaise pour l'économie. Mais je suis plus mitigé. Si les prix baissent, c'est une bonne nouvelle pour les consommateurs. C'est un bon moyen de rendre du pouvoir d'achat et un outil de justice sociale, dans un contexte actuel de crise. Néanmoins, ce n'est pas aussi simple. La déflation renchérit le coût de la dette. Les agents économiques qui doivent rembourser n'apprécient pas une baisse des prix. Et un des agents les plus endettés, c'est l'Etat.
Ce phénomène peut-il être amené à durer ?
Le Japon est en déflation depuis près de 20 ans. Donc oui, c'est une situation qui peut durer très longtemps. Ce que montre l'expérience, c'est qu'il faut tenter d'y remédier très tôt. Des politiques monétaires sont alors mises en place, et on fait fonctionner ce qu'on appelle la "planche à billets". En Europe, la Banque Centrale Européenne fait ce qu'elle peut. Mais il est impossible de savoir si la politique de la BCE a été mise en place assez tôt. Il faudra encore attendre pour le savoir.
Est-ce un signe inquiétant pour l'économie française ?
Il faut relativiser. Le monde entier est dans une situation d'inflation très basse. Au Japon, la déflation est présente depuis très longtemps, et l'Europe connaît ce contexte depuis quelques mois. Pour ces deux exemples, c'est de la mauvaise déflation. Mais le vrai risque, c'est que les consommateurs et les investisseurs repoussent leurs décisions. Si on achète et on investit moins, on entre en récession. Il y a des craintes, oui, mais il ne faut pas céder à la panique. Au 19e et au 20e siècle, lors des grandes révolutions industrielles, il y a eu de gros gains de productivité qui ont mené à une baisse des prix, de la déflation, alors même que la croissance était forte. Il n'y a donc pas d'automatismes entre la déflation et la récession. C'est prématuré de dire que c'est catastrophique.