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Antoine Terrel
SALAIRES, CONGÉS, L'ENTREPRISE PEUT-ELLE IMPOSER AU SALARIÉ DES EFFORTS POUR RELANCER L'ÉCONOMIE - Alors que la crise du coronavirus a sérieusement impacté l'économie, des entreprises sont tentées de demander à leurs salariés de faire des efforts pour permettre de relancer l'activité. Au micro d'Europe 1, l'avocat en droit du travail Kévin Mention rappelle que cela ne peut que très rarement être imposé unilatéralement.
INTERVIEW

Alors que l'épidémie de coronavirus et le confinement ont très sévèrement impacté l'économie, une entreprise peut-elle imposer à ses salariés de renoncer à un certain nombre d'avantages ? Lundi, le SNPNC-FO, syndicat majoritaire chez Ryanair en France, a ainsi dénoncé "un chantage au licenciement" exercé par la compagnie irlandaise à bas coûts sur son personnel dans l'Hexagone pour obtenir des baisses des salaires, en utilisant le "prétexte" du coronavirus. Invité mercredi d'Europe 1, l'avocat en droit du travail Kévin Mention fait le point sur les règles en la matière, et conseille aux salariés concernés de s'assurer d'une forme de redistribution ultérieure des avantages concédés 

Baisse du salaire, renoncement aux vacances, ou encore augmentation du temps de travail, un patron "peut proposer ce genre de mesure", confirme Kévin Mention. Mais, précise-t-il, "cela doit être dans certains cas directement accepté par le salarié. Dans les autres cas, cela doit être négocié par accord d'entreprise ou accord de branche". En revanche, "cela peut être très rarement imposé unilatéralement, sauf, par exemple, dans le cas de la prise des RTT à certains moments de l'année. Mais ça reste encadré".

Il ne faut pas que l'exception devienne la règle

Concernant une proposition semblable à celle de Ryanair, "cela peut se faire, mais c'est au salarié de choisir", explique Kévin Mention, qui conseille aux employés concernés de prévoir avec leur entreprise "une clause de retour à meilleure fortune", pour que "l'avantage qu'ils consentent auprès de l'entreprise leur soit redistribué si celle-ci va mieux un peu plus tard". 

Pour un chef d'entreprise qui souhaiterait demander des efforts à ces salariés, quels sont les éventuels leviers dont il dispose ? "Des propositions de baisse de salaire, fixe ou variable, la suppression du 13e mois, de l'indemnité de transport, l'impact sur les RTT, beaucoup de mesures peuvent être mises en oeuvre", détaille l'avocat, qui précise aussitôt qu'"il faut que l'entreprise en ait réellement besoin, que ça soit vraiment compris par les salariés, et que ces derniers en aient un retour quand l'entreprise va mieux". Surtout, ajoute-t-il, "il ne faut pas que l'exception devienne la règle sur ces questions-là". 

Ce genre de mesure sont-elles plus facile à mettre en place dans une petite ou moyenne entreprise ? "Ça devrait l'être", abonne Kévin Mention, car si le dialogue social est fort au sein d'une entreprise de ce type, "les salariés peuvent mieux comprendre les difficultés, et les entrepreneurs leur expliquer plus facilement. Les salariés peuvent plus facilement admettre des efforts et négocier des contreparties avec l'employeur pour après".