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Chaque matin, Nicolas Beytout analyse l'actualité politique et nous livre son opinion. Ce jeudi, il s'intéresse sur la proposition de loi sur la fin de vie qui sera débattue ce jeudi après-midi à l’Assemblée. Selon lui, elle a été utilisée par quelques centaines de députés En Marche comme un marqueur politique de gauche.

La proposition de loi sur la fin de vie sera débattu ce jeudi après-midi à l’Assemblée.

Oui, enfin débattu, c’est vite dit ! une poignée d’heures consacrées à un sujet, l’euthanasie ou le suicide programmé, qui devrait animer des jours et des jours de débat dans l’ensemble du pays. Même remarque sur le titre de cette proposition de loi : parler de "garantir une fin de vie libre et choisie", c’est utiliser un vocabulaire qui banalise volontairement la question. Le sujet du choix de sa mort est tellement profond, tellement grave et complexe, qu’il ne peut pas être bâclé en quelques centaines de minutes de discours. Il mérite un vrai débat.

Ce qui veut dire que le débat de ce jeudi après-midi n’en est pas vraiment un ?

Exactement. En réalité, la finalité de ce débat, c’est de faire un coup politique. Cette proposition de loi a été utilisée par quelques centaines de députés En Marche comme un marqueur politique : beaucoup de parlementaires sont en effet convaincus qu’il faut (à un an de la présidentielle) envoyer un signal de gauche pour rééquilibrer un bilan supposé verser trop à droite. Or, les sujets de société sont parfaitement calibrés pour ça : militer pour l’IVG étendue, pour la PMA pour toutes ou pour l’euthanasie, dans l’esprit de ces parlementaires, c’est être progressiste. Banco…

Tout de même, on peut croire en leur sincérité lorsqu’ils défendent cette loi.

Naturellement, Nicolas Beytout ne le nie pas. Et ils ont même été rejoints par certains membres de presque tous les autres partis politiques, qui ont le même point de vue sur la fin de vie et ont saisi l’opportunité de le montrer. Mais quand on veut faire avancer un sujet aussi lourd, on ne fait pas l’erreur de le saboter. Or c’est vraiment ce qui va se passer : le créneau qu’ils ont choisi pour faire passer leur texte n’avait aucune chance de succès. D’abord parce qu’une partie de la majorité et du gouvernement, dont le Premier ministre, est contre. Avec un argument imparable : parler de faciliter la mort alors que les hôpitaux sont submergés de malades qu’on essaye d’aider à survivre, c’est vraiment incongru. Mieux : Emmanuel Macron ne soutient pas cette proposition de loi : le pays n’est pas mûr, semble-t-il penser. Et il se satisfait donc de voir que l’initiative des parlementaires va aller directement dans le mur…

Parce qu’elle ne sera pas adoptée ? On en est sûr ?

Aucune chance, non. Parce qu’une escouade de députés LR, un peu filous sur les bords, a bloqué le débat en déposant plus de 2.000 amendements, ce qui rend leur examen mécaniquement impossible dans le temps imparti. Voilà : à trop vouloir forcer un débat d’ampleur national et l’expédier au Parlement, on s’expose à plus rusé que soit. Pour son 5e anniversaire, cette semaine, le mouvement La République en marche a en tout cas démontré qu’il avait encore de gros progrès à faire en cohérence interne et en maîtrise des rouages de la vie politique.