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Tous les matins après le journal de 8h30, Emmanuelle Ducros dévoile aux auditeurs son «Voyage en absurdie», du lundi au jeudi.

Annonce du G7 des ministres du climat, de l’énergie et de l’environnement au Japon, le week-end passé: ils se sont engagés à mettre fin à la pollution plastique, avec l’ambition de la réduire à zéro d’ici à 2040.

Prélude à la négociation d’un traité international contre la pollution plastique prévue fin mai à Paris. Ce traité, on en parle depuis un an. 175 pays ont adopté à l’ONU une résolution pour, un traité juridiquement contraignant d’ici à fin 2024.

Il y a urgence.  Le monde est dans une boulimie de plastique. Selon l’OCDE, la production est passée entre 2000 et 2019 de 234 à 460 millions de tonnes. Elle a doublé en 20 ans.

Et en 2019, 22 millions de tonnes ont été rejetées dans l’environnement. Les plastiques représentent « au moins 85 % du total des déchets marins », selon l'ONU.

Mais avant d’éradiquer les déchets de plastique, il faut faire des constats.

Oui, et ne pas se tromper de cible. Une moitié du plastique est produit en Asie, la Chine à elle seule, produit un tiers du plastique de la planète. Des productions qui connaissent des croissances délirantes, alors qu’en Europe, on est plutôt sur des tendances stables, voir baissières.

Bien sûr, il faut trier, recycler. Mais avoir bien conscience que ce n’est pas seulement, ici, dans les pays développés que ça se joue. L’Europe recycle un tiers de ses plastiques, elle doit faire bien mieux... Mais c’est sans commune mesure avec l’effort à faire pour le reste de la planète :  9% seulement des plastiques du monde sont recyclés. L’immense majorité des pollutions plastique vient des pays en développement , qui ont besoin d’une aide d’urgence et d’investissement pour gérer ce qui va avec le développement des classes moyennes, c’est à dire la consommation de plastique sans les moyens de la gérer.

Ça n’exonère pas du tout les pays développés de leur part de remise en question.

La fin du plastique jetable, ou du moins sa limitation drastique est nécessaire. Mais il faut aussi lutter contre un phénomène récurrent : la tendance des metteurs en marché, fabricants de plastiques, ou grosses entreprises agroalimentaires, à utiliser des plastiques innovants qui ont pour inconvénient de ne pas avoir les processus de recyclage adaptés. L’idée, c’est d’inverser le processus, de penser au cycle de vie global de la matière.

Ça ne veut certainement pas dire qu’il faut cesser d’innover, parce que des plastiques de nouvelle génération, ça peut vouloir dire des matériaux plus légers, plus solides et donc réutilisables, ou au contraire biodégradables avec des bactéries.

Ou encore, des plastiques qui intègrent des matières végétales : du sucre, de l’amidon de maïs ou de blé. Ils pèsent moins de 1% de la production mondiale. On peut les développer, de façon rationnelle.

Car on ne se passera pas du plastique.

Non, il ne faut pas être manichéen et jeter le bébé en plastique avec l’eau du bain polluée aux micro particules. Le plastique nous envahit, mais il a aussi permis des gains fantastiques pour la médecine, l’hygiène, la sécurité alimentaire. C’est aussi un matériau fiable, plus économique à transporter que le verre, qui résiste à des conditions extrêmes de corrosion, de chaleur, etc. On  n’a aucun intérêt à s’en passer totalement, et à refuser aux pays e dev les progrès permis par les plastiques.  La nécessaire lutte contre les pollutions ne doit absolument pas devenir une “plasticophobie”. Pas facile dans un monde qui aime se trouver des ennemis bien méchants.