Son parcours, autant que son profil, restent insaisissables. Pourtant, Salah Abdeslam n’a pas joué la carte de la discrétion, que ce soit en amont des attaques, qu’après la soirée du 13 novembre, révèle Le Parisien. Contrôlés à plusieurs reprises, ce Français de 26 ans, visé aujourd'hui par un mandat d’arrêt, a pu poursuivre sa route. Si les enquêteurs sont parvenus à retracer son parcours, des incertitudes demeurent sur son rôle précis dans les attentats, qui ont fait 130 morts à Paris.
Février : arrêté pour possession de cannabis. Salah Abdeslam apparaît pour la première fois dans les radars des policiers remontent à février 2015. A l’époque, son contrôle par des policiers néerlandais n’a rien à voir avec des soupçons de radicalisation. Salah Abdeslam est arrêté, lors d’un contrôle routier, dans le centre des Pays-Bas, pour détention de cannabis. "Le cannabis a été saisi et Abdeslam est finalement reparti après avoir payé une amende de 70 euros", avait indiqué, en novembre dernier, la police néerlandaise dans un communiqué.
4 août : en Grèce. Salah Abdeslam se fait ensuite discret pendant six mois. Le 4 août, il est repéré en Grèce, d’où il embarque pour Bari, en Italie. Cette fois, son signalement pourrait être lié à la préparation logistique des attentats. Il voyage alors avec Ahmed Dahmani, un possible complice interpellé en Turquie, le 21 novembre dernier, alors qu'il tentait de passer en Syrie. Les deux hommes ont-ils réalisé cette traversée pour récupérer des complices ou acheminer du matériel en vue de perpétrer les attaques ? Les policiers de la sous-direction antiterroriste (SDAT) planchent sur ces pistes.
9 septembre : en Autriche. Un mois plus tard, le 9 septembre, Salah Abdeslam est contrôlé à la frontière autrichienne, alors qu'il entreprend de se rendre à Budapest, en Hongrie. Au volant d'une Mercedes de location immatriculée en Belgique, l'homme est accompagné de deux individus, qui se présentent sous l’identité, sans doute fausse, de Samir Bouzid et Soufiane Kayal, selon Le Parisien. Salah Abdeslam pourrait les avoir récupérés à leur retour de Syrie, en vue de leur implication dans les attaques parisiennes. Les policiers belges ont lancé le 4 décembre dernier un appel à témoins concernant ces suspects "dangereux et probablement armés".
17 septembre : en Hongrie. Moins de dix jours plus tard, le 17 septembre, Salah Abdeslam part de Belgique direction Budapest. Là-bas, le jeune homme de 26 ans est suspecté d’avoir "recruté une équipe" parmi des migrants ayant transité par la gare de Budapest.
Courant octobre : à Saint-Ouen-L’Aumône pour s’équiper. Courant octobre, l’échéance des attentats approche, et Salah Abdeslam accélère les démarches logistiques. Il se rend chez un vendeur de matériel de feux d'artifice de Saint-Ouen-l'Aumône, dans le Val-d'Oise, où il achète une dizaine d'allumeurs pyrotechniques, ayant probablement servi à la confection des ceintures d’explosifs. Cet achat, Salah Abdeslam le fait en toute transparence puisqu’il fournit sa pièce d’identité au vendeur.
10 novembre : des allers-retours France-Belgique. Le 10 novembre, à 21 heures, la Clio noire retrouvée dans le 18e arrondissement après les attentats, est flashée à Trith-Saint-Léger, près de Valenciennes, en direction de Paris. Vers 23 heures, la voiture louée par Salah Abdeslam repart vers la Belgique. A 1 h 28, elle est de retour en France, où elle passe le péage de Chamant, près de Senlis, dans l'Oise, indique Le Parisien.
11 novembre dans une station essence à Ressons-sur-Matz. Le 11 novembre, deux jours avant les attentats, il apparaît sur les vidéos de caméras surveillance d’une station-service de Ressons-sur-Matz, près de Compiègne, dans l’Oise. Il est accompagné de Mohamed Abrini, visé par un mandat d’arrêt international lancé par la police belge. Les deux hommes sont filmés vers 19 heures, alors qu’ils font une pause à cette station-service de l'autoroute A1, entre Bruxelles et Paris.
12 novembre, en Belgique avant le départ des commandos. Le lendemain, c’est en Belgique que Salah Abdeslam est repéré, toujours au volant de la Clio noire. Ce jour-là, le convoi de trois voitures (une Clio, une Polo, une Seat) prend la route, direction Paris. Les trois véhicules partent à dix minutes d’intervalles. Les auteurs des attentats de Paris se divisent ensuite en deux groupes. Les futurs tueurs du Bataclan (Ismaël Omar Mostefaï, Samy Amimour et Foued Mohamed-Aggad), au volant de la Polo, ont réservé deux chambres dans une résidence hôtelière à Alfortville, dans le Val-de-Marne. Les autres s'installent dans un pavillon, loué par Salah Abdeslam, pour une semaine, à Bobigny, en Seine-Saint-Denis.
13 novembre : à Roissy, Paris, Bagneux, Châtillon… Le 13 novembre, vers 18 heures, la plaque d’immatriculation du véhicule de Salah Abdeslam est localisée à son insu par un système de lecture automatisé, révèle Le Parisien. Le suspect se trouve à Roissy, dans le Val-de-Marne. Il regagne ensuite le pavillon de Bobigny, d’où il part à 20h38, aux côtés des trois kamikazes du Stade de France.
A 21h59, soit 40 minutes après la première explosion au Stade de France, Salah Abdeslam se gare place Albert-Kahn, dans le XVIIIe arrondissement de Paris. Selon les revendications de l’Etat islamique, un attentat devait avoir lieu dans ce quartier de Paris. Il n’en est rien. Salah Abdeslam achète une puce téléphonique rue Doudeauville, l’active immédiatement, et passe plusieurs appels en Belgique. Il demande notamment à Hamza Attou et Mohammed Amri de venir le récupérer. Le terroriste présumé a également passé un appel à un détenu de la prison de Namur, une ville belge au sud-est de Bruxelles.
Salah Abdeslam débute alors sa cavale. Il s’enfuit à métro, direction la banlieue sud, où il repéré à Montrouge à 23 h 17 - c’est dans ce même quartier que le gilet d’explosifs qui pourrait lui avoir appartenu a été retrouvé. A 23h30, son téléphone borne à Bagneux, puis entre 0h16 et 5h27 à Chatillon où ses complices belges viennent le chercher au petit matin. Les trois individus filent au volant d’une Golf vers la Belgique.
14 novembre, en fuite vers la Belgique. A 9h10, ils sont contrôlés par des gendarmes près de Cambrai, dans le Nord. Fichés en Belgique pour des faits de délinquance, Salah Abdeslam peut repartir, puisqu’aucun élément ne le relie pour l’instant aux attentats.
A 14h30, un proche le dépose dans une rue de Schaerbeek, une commune populaire du nord de Bruxelles. "J'ai mis mon nom dans tout, je suis cramé", a-t-il lâché à Ali Oulkadi, interpellé en Belgique, d'après Le Monde. Selon ce dernier, Salah Abdeslam a précisé qu'il ne devait "pas être là au moment des faits" et qu’il entreprend de "changer de tête".
En Syrie ? Depuis, l'homme le plus recherché d'Europe reste introuvable. Quarante-huit heures après les attentats, Abdelhamid Abaaoud, présenté comme le chef d’orchestre, aurait eu une conversation téléphonique avec Salah Abdeslam. Ce dernier aurait affirmé se trouver en sécurité en Syrie. Une piste que les enquêteurs n’ont jamais pu confirmé.