L'INFO. C'est une disposition sans précédent en Europe mais elle fait polémique. Dimanche, la zone euro et le Fonds monétaire international (FMI) ont acté un plan de sauvetage de 10 milliards d'euros en contrepartie d'une taxe sur les dépôts bancaires. Si les négociations sont toujours en cours, cette décision aurait des répercussions dans cette petite île qui est devenue au fil des années un grand paradis fiscal.
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Où ça se trouve ? Chypre, petite île de seulement 9.000 km2, profite de sa situation géographique. Au cœur de la mer Méditerranée, ce pays, entré dans l'Union européenne en 2004, est un véritable carrefour entre l'Europe, l'Afrique et l'Asie.
Un paradis fiscal et du blanchiment d'argent. De nombreuses entreprises étrangères ont choisi Chypre pour s’exiler. Elles profitent ainsi d'avantages fiscaux notables, d'un secret bancaire bien gardé, d'un territoire bien placé et d'une régulation laxiste. Comme l'explique le quotidien Les Echos, de des sociétés de courtage en ligne du monde entier se sont, par exemple, domiciliés à Chypre depuis les années 2000. Certaines entreprises en ont même profité pour blanchir de l'argent sale. L'île s'est d'ailleurs retrouvée sur la liste noire des paradis fiscaux de l'ONU et de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).
Pour limiter ces dérives, une autorité de régulation du marché financier a été mise en place. Il faut désormais une autorisation délivrée par la commission de surveillance financière pour pouvoir réaliser des opérations financières d'envergure. Mais certaines transactions restent toujours particulièrement opaques.
Des capitaux russes par millions... Avec sa taxe unique à 10%, Chypre est la première destination pour les fuites de capitaux russes. Le montant se chiffre à plus de 43 milliards d'euros en 2012, dont 27 milliards considérés par la Banque centrale comme des transferts illégaux. L'agence Moody's a elle évalué à 14 milliards de d'euros les seuls avoirs de sociétés russes placés à Chypre, auxquels s'ajoutent 9 milliards d'avoirs de banques russes dans des établissements chypriotes. Les sommes considérables placées à Chypre, qui font le chemin inverse quand il s'agit de les utiliser, font de l'île le premier investisseur en Russie.
... et des investisseurs en colère. Avec de telles sommes, la Russie se trouve donc en première ligne après l'annonce d'un plan d'aide à l'île méditerranéenne, qui comprend une taxe sur les dépôts bancaires. La Russie a d'ailleurs dénoncé cette décision de lundi comme "injuste" et "dangereuse". Elle entraînerait selon les experts cités lundi par la presse russe une perte d'environ deux à trois milliards d'euros pour les seuls ressortissants russes. Le ministre russe des Finances Anton Silouanov a regretté une décision prise sans concertation et menacé de revenir sur sa proposition d'assouplir les conditions du crédit de 1,9 milliard d'euros accordé à Nicosie en 2011.
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Certains hommes d'affaires s'étranglent d'être taxés de la sorte. "Seuls les bolchéviks pratiquaient de telles choses pendant la guerre! Aucun autre pays au seuil d'une faillite n'a jamais agi de la sorte", s'indigne le milliardaire Alexandre Lebedev, cité par le quotidien. Sur son compte Twitter, l'homme d'affaires, réputé critique du pouvoir, a assuré qu'il ne détenait que 50.000 dollars à Chypre : "le reste est investi dans l'économie russe".