Etats-Unis : le créateur de "l’eBay de la drogue" condamné à perpétuité

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Des soutiens de Ross Ulbricht, lors de son procès à New York, début 2015. © SPENCER PLATT / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP
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C. P.-R. avec AFP
JUSTICE - Le créateur de Silk Road, site de vente en ligne de drogues, a été condamné vendredi, à New York, à la réclusion à perpétuité. Sans possibilité de libération.

Le plus grand supermarché de la drogue en ligne, c’était son idée. Ross Ulbricht, créateur du site Silk Road ("route de la soie" en français), a été condamné vendredi à la réclusion à perpétuité, sans possibilité de libération. Le verdict le plus sévère possible.

Alias "Dread Pirate Roberts". Cet homme de 31 ans, né au Texas, avait été reconnu coupable par le tribunal de New York, en février dernier, des sept chefs d’accusation retenus à son encontre ; notamment ceux de blanchiment, trafic de stupéfiants, entreprise criminelle et piratage informatique. Lors de ce procès qui a duré quatre semaines, son avocat Joshua Dratel avait essayé, en vain, de convaincre que Ross Ulbricht n'était pas le vrai cerveau du site. Mais les jurés avaient estimé qu'il était bien "Dread Pirate Roberts", le pseudonyme derrière lequel se cachait l'opérateur du site.

Bitcoins contre drogue à domicile. C’est en janvier 2011 que ce Californien privilégié a lancé ce site de marché noir, souvent surnommé "L’eBay de la drogue" et inaccessible via les navigateurs classiques. Pour faire ses emplettes sur ce supermarché illégal, il suffisait d’y accéder via le réseau informatique parallèle Tor. Là, n’importe qui pouvait acquérir, entre bien d’autres produits illégaux, héroïne, cocaïne, LSD et faux documents. La transaction était simple : on payait en bitcoin, la monnaie virtuelle, garantissant l'anonymat des dizaines de milliers d'acheteurs à travers le monde.

18 millions de "chiffre d’affaires". Sur ce site, qui d’après l’accusation, a enregistré plus d'un million de transactions de drogue, Ross Ulbricht a ainsi vendu pour 200 millions de dollars de drogue (soit plus de 180 millions d'euros) à des consommateurs du monde entier. Un business qui aurait permis au créateur du site d’amasser une fortune de 18 millions de dollars, toujours selon l'accusation. 

Jamais libérable. Vêtu d'une tenue de prisonnier noire, Ross Ulbricht n'a pas montré d'émotion particulière à l'énoncé du verdict. Sa mère, assise dans le public, qui avec son père a suivi toutes les évolutions de son dossier, s'est pris la tête entre les mains. En plus des deux peines de réclusion à perpétuité pour trafic de stupéfiants et entreprise criminelle, la juge fédérale de Manhattan, Katherine Forrest, l'a aussi condamné à cinq, 15 et 20 ans de prison pour piratage, trafic de faux documents et blanchiment, les peines maximales pour ces délits. Elle a précisé au condamné qu'il ne pourrait jamais être libéré. 

Un site mettant en danger la société. "Ce que vous avez fait avec Silk Road était terriblement destructeur pour le tissu social", a-t-elle déclaré, à l'issue d'une audience de trois heures, en soulignant que l'éducation privilégiée de Ross Ulbricht et ses études supérieures rendaient ses actions plus incompréhensibles que celles d'un trafiquant de drogue habituel. Elle a ajouté que les autorités réclamaient aussi la confiscation de 183,9 millions de dollars générés par les ventes de drogues sur Silk Road.

"Si on me donnait une chance"... Les parents d'un Bostonien de 25 ans et d'un adolescent australien de 16 ans ont raconté leur drame, leurs fils étant décédés après avoir consommé des drogues achetées sur Silk Road. Ross Ulbricht s'est alors mis à pleurer et a rejeté le portrait qu'a fait de lui l'accusation, le décrivant comme un homme vain et cupide avec des comportements de sociopathe. Si on me donnait une chance, je n'enfreindrais plus la loi", a-t-il promis. "Je ne suis pas un sociopathe [...] égocentrique. J'ai juste fait de très grosses erreurs".

Soupçonné d’assassinats. Sur son site, fermé par le FBI en octobre 2013 - après son arrestation à San Francisco -, on trouvait aussi des kits de piratage, des faux papiers ou encore des services de tueurs à gage, d'après l'accusation qui soupçonnait également Ross Ulbricht d'avoir commandité cinq assassinats dans son entourage, pour protéger le secret entourant les transactions du site. Rien n'a cependant permis d’établir que ces meurtres aient eu lieu.