Incendies volontaires et défrichement excessifs, voilà les deux ingrédients qui ont coûté, depuis le mois de juin, pas moins de 1,7 million d’hectares sur les îles de Kalimantan et Sumatra. Chaque année, des incendies de forêts et terres agricoles sont déclenchés volontairement pendant la saison sèche, avant tout pour la culture sur brûlis. Cette technique primitive et illégale est utilisée comme moyen de défrichement et de fertilisation dans les zones tropicales pour laisser place à diverses cultures, notamment des palmiers à huile.
Des images aériennes filmées avec un drone par Greenpeace montrent l'ampleur des dégâts de ces incendies. L'épaisse fumée blanche provenant des provinces de Sumatra et Kalimantan en Indonésie se répand également en Malaisie et à Singapour. Des dizaines de milliers de personnes souffrent d'infections respiratoires en raison de ce brouillard nocif qui perturbe le trafic aérien en Indonésie et entraîne des fermetures temporaires d'écoles dans les trois pays.
Ces nouvelles images aériennes montrent une fumée âcre s'échappant de la jungle, des arbres dévastés par le feu, des tourbières brûlées et une ville enveloppée de fumée à Kalimantan, partie indonésienne de l'île de Bornéo.
" Le drainage des tourbières ont transformé le paysage indonésien en une énorme bombe de carbone "
Les tourbières, ces bombes à retardement. "Les sociétés détruisant les forêts, et le drainage des tourbières ont transformé le paysage indonésien en une énorme bombe de carbone" accentuée par le phénomène de sécheresse, a indiqué Bustar Maitar, un Indonésien chargé de la forêt pour Greenpeace en Asie du Sud-Est.
Les tourbières stockent d'importantes quantités de carbone et deviennent d'énormes sources d'émission de gaz à effet de serre lorsqu'elles sont drainées et exploitées, principalement pour l'agriculture.
Un boycott des produits indonésiens. A Singapour, où la qualité de l'air est mauvaise depuis des semaines, la chaîne de supermarchés NTUC a annoncé le retrait de ses rayons de tous les produits en papier provenant du groupe indonésien Asia Pulp and Paper (APP), ayant des bureaux à Singapour et dont les pratiques de déboisement sont dénoncées par des ONG. Des dizaines de personnes parmi lesquels des cadres de sociétés soupçonnées d'avoir provoqué des incendies font l'objet d'enquêtes en Indonésie.
Outres les Hommes, les animaux sont aussi victimes de ces incendies. C’est notamment le cas des orangs-outans, espèce très menacée qui vit dans les forêts de palmiers. Ces grands singes tombent malades, affamés et traumatisés par la destruction d'une grande partie de leur habitat et les fumées toxiques.
Le président indonésien, Joko Widodo, a écourté en début de semaine son déplacement aux Etats-Unis pour revenir au pays et s'occuper de la crise des incendies. Une trentaine d'avions ont été déployés et des dizaines de milliers de militaires sont mobilisés pour lutter contre les feux de forêts. Mais des responsables à Kalimantan se plaignent des moyens insuffisants à leur disposition.
Et cette crise écologique intervient au moment où l’Indonésie s’est engagée, dans le cadre de la COP 21, à réduire de 29% d'ici 2030 ses émissions de CO2. Mais petit souci : ces incendies produisent chaque jour plus de gaz à effet de serre que les Etats-Unis entiers, en un jour.