La gâchette facile. Pour la première fois aux Etats-Unis, les bavures policières ont été comptabilisées de façon indépendante sur toute une année: avec plus de 1.100 civils tués, cet inquiétant bilan 2015 confirme l'urgence de réformer les modes d'intervention des forces de l'ordre. La dernière affaire plus qu'embarrassante pour les autorités s'est déroulée samedi à Chicago: appelés pour une simple dispute familiale, des agents en patrouille ont apparemment eu la gâchette facile, abattant un homme de 19 ans et sa voisine, mère de cinq enfants. Le premier, Quintonio LeGrier, brandissait une batte de base-ball et souffrait de troubles psychiatriques et la deuxième, Bettie Jones, n'a selon ses avocats fait qu'ouvrir sa porte.
Plus de 1.100 personnes tuées. De telles fusillades sont fréquentes en Amérique. Deux journaux, l'édition américaine du Guardian et le Washington Post, ont donc tenu leur propre recensement en 2015, année charnière en raison de la multiplication de vidéos - amateur ou embarquées par les policiers - à la source de scandales fracassants. Selon The Counted, le site du Guardian, 1.130 personnes ont été tuées par la police au jour de jeudi, que ce soit par balle, par Taser, renversées par un fourgon ou en garde à vue. Le Washington Post, qui ne compte que les personnes tuées par balle, avait lui jeudi un bilan de 979 civils tués par la police. Ces morts se partagent en trois catégories: ils étaient armés et donc représentaient une menace, ils souffraient de troubles mentaux ou suicidaires, ou ils étaient en train de fuir une interpellation. Dans la majorité des cas où les policiers ont abattu un agresseur armé, cet individu était blanc, souligne le quotidien. Mais la question de l'origine ethnique est bien centrale pour les cas où le danger était moindre, précise-t-il: les hommes noirs, qui constituent seulement 6% de la population américaine, représentent 40% des personnes non armées abattues par les policiers.
Abus policiers contre les Noirs. De son côté, le FBI rend public seulement son recensement des "homicides justifiés", soit les criminels tués dans le cadre de la loi par les forces de l'ordre. En 2014, le bilan officiel avait été de 444 personnes. Mais le vent tourne, face à l'ampleur des bavures et sous la pression notamment du mouvement Black Lives Matter, à la pointe des dénonciations d'abus policiers contre des Noirs. La ministre américaine de la Justice Loretta Lynch a lancé une étude pilote en estimant que des données statistiques complètes étaient "cruciales pour la transparence et l'attribution des responsabilités".