L'Etat du Nebraska a procédé mardi à la première exécution aux Etats-Unis d'un prisonnier par une injection létale contenant du fentanyl, un opiacé puissant à l'usage controversé. Carey Dean Moore, 60 ans, avait été condamné à mort pour le meurtre de deux chauffeurs de taxi en 1979. Son décès a été prononcé à 10h47 (16h47 heure française) mardi. L'exécution a duré une vingtaine de minutes, a indiqué Scott Frakes, directeur du Département des services pénitentiaires du Nebraska.
"Respect de la procédure". "Je reconnais que l'exécution d'aujourd'hui touche de nombreuses personnes à plusieurs niveaux", a-t-il ajouté, précisant qu'elle avait été menée avec "professionnalisme, respect de la procédure et dignité pour toutes les parties impliquées". "Calme et posé", selon les médias présents sur place, Moore s'est tourné vers ses proches, notamment son frère, pour leur demander pardon et leur adresser ses derniers mots, "je vous aime", à trois reprises. On lui a ensuite administré un cocktail de quatre substances, dont trois n'avaient encore jamais été utilisées lors d'une exécution : le sédatif diazépam, le puissant analgésique fentanyl, le relaxant musculaire cisatracurium et du chlorure de potassium, qui arrête le cœur.
50 fois plus puissant que l'héroïne. L'usage du fentanyl, responsable de dizaines de milliers de morts par overdose aux Etats-Unis, est particulièrement décrié. Cet opiacé est cinquante fois plus puissant que l'héroïne et près de cent fois plus puissant que la morphine. Dans le but de protéger sa réputation, un laboratoire pharmaceutique allemand avait engagé une procédure judiciaire pour bloquer l'exécution de Moore, affirmant que le Nebraska avait illégalement obtenu des produits auprès de sa société. "Fresenius Kabi ne prend pas position sur la peine capitale" mais "s'oppose à l'utilisation de ses produits à cette fin et ne vend donc pas certains médicaments aux établissements pénitentiaires", avait déclaré le laboratoire dans sa plainte au civil. Un appel rejeté par un tribunal fédéral, qui a donné lundi son feu vert à l'exécution.
Les prisons à court de cocktails létaux. Pour Robert Dunham, directeur du Centre d'information sur la peine de mort, cette première exécution au fentanyl dans le Nebraska "montre que les Etats sont à la recherche de produits disponibles". Les cocktails létaux sont devenus difficiles à obtenir en raison de l'opposition du public et de la réticence, ou de l'hostilité pure et simple, des laboratoires pharmaceutiques à les vendre aux prisons pour procéder à des exécutions. Le Nebraska n'avait plus exécuté de prisonnier depuis 1997. Il s'agit de la première mise à mort par injection létale de son histoire.