Ultimatum de Bagdad, menaces de la Turquie, critiques acerbes de Damas et de Téhéran : 48 heures après son référendum d'indépendance et un "oui" qui ne fait aucun doute, le Kurdistan irakien de Massoud Barzani est la cible des pressions unanimes de ses voisins. Initialement prévus mardi soir, les résultats de ce référendum se faisaient attendre. Mais avec l'officialisation du "oui", qui devrait intervenir sans doute mercredi, la région autonome irakienne du Kurdistan a vu tous ses voisins hausser le ton.
L'Irak lance un ultimatum. Refusant de négocier avec Massoud Barzani "sur la base du référendum", le Premier ministre irakien Haider al-Abadi a lancé un ultimatum à Massoud Barzani, lui intimant l'ordre de remettre aux autorités centrales le contrôle de ses deux aéroports régionaux, à Erbil et Souleimaniyeh. En cas de refus, tous les vols internationaux depuis et vers le Kurdistan seront interdits à partir de vendredi. Le gouvernement central "imposera son autorité conformément à la Constitution", pour maintenir l'unité de l'Irak, avait martelé un peu plus tôt Haider al-Abadi, après que Massoud Barzani a de son côté appelé Bagdad "à ne pas fermer la porte du dialogue".
Dimanche, déjà, à la veille du vote, le pouvoir central irakien avait demandé aux pays étrangers de ne plus traiter qu'avec lui pour toutes les transactions pétrolières, l'or noir étant la principale source de revenus du Kurdistan irakien.
3,3 millions de votants. Le référendum sur l'indépendance, une décision unilatérale prise par Massoud Barzani, s'est tenu lundi dans cette région - qui comprend les provinces d'Erbil, Souleimaniyeh et Dohouk -, mais aussi dans des zones que se disputent les Kurdes et le gouvernement central. Plus de 3,3 millions de personnes se sont rendues aux urnes, soit 72,16% des 4,58 millions d'inscrits, selon la commission électorale. Mais dans la région de Souleimaniyeh, fief de l'Union patriotique du Kurdistan (UPK), parti rival de Massoud Barzani, ce taux a été de 50% seulement.
L'indépendance pas pour tout de suite. Les Kurdes s'attendent à un oui "massif" et ont déjà célébré lundi soir dans leur capitale, Erbil, avec force feux d'artifices, drapeaux et danses. Mais le rêve d'indépendance chéri depuis un siècle ne devrait pas devenir réalité dans un futur proche. Le Parlement de Bagdad a voté lundi une résolution réclamant le déploiement des forces "dans toutes les zones" disputées, mais celle-ci n'a pas encore été concrètement appliquée.
Les critiques d'Erdogan. A l'étranger, ce scrutin est toujours aussi largement critiqué, tout particulièrement par la Turquie, la Syrie et l'Iran, trois pays voisins comptant des minorités kurdes. Le président turc Recep Tayyip Erdogan a mis en garde mardi contre un risque de "guerre ethnique et confessionnelle" si le Kurdistan irakien menait à terme son projet d'indépendance.