Lula, du héros ouvrier au politicien contesté

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avec AFP , modifié à
L’ancien président, longtemps vu comme un héros par une grande partie des Brésiliens, est désormais perçu comme un politique qui n'a pas su résister aux sirènes de la corruption.

Ancien ouvrier métallurgiste devenu le président le plus populaire de l'histoire du Brésil (2003-2010), Luiz Inacio Lula da Silva, 70 ans, est un animal politique hors normes, au mythe terni par des soupçons de corruption. Retour en images sur la métamorphose du syndicaliste ouvrier devenu un leader contesté.

"J'ai connu la faim". Rien ne prédisposait à un aussi fabuleux destin ce cadet d'une fratrie de huit enfants né le 6 octobre 1945 dans une famille d'agriculteurs pauvres du Pernambouc au nord-est du Brésil. Lula avait sept ans lorsqu'il émigre avec sa famille à Sao Paulo, dans le sud, pour échapper à la misère.

"J'ai connu la faim, et quand on a connu la faim, on ne renonce jamais", a-t-il récemment rappelé. Enfant, il cire des chaussures pour rapporter un peu d'argent à la maison. Ouvrier métallurgiste à 14 ans, il perd l'auriculaire gauche dans un accident du travail. A 21 ans, il entre au syndicat des métallurgistes et en devient le président en 1975.

CLAUDINEI PETROLI / AESTADO/FILES / AFP

L'ouvrier charismatique. Doucement, le jeune ouvrier syndicaliste prend de l’assurance et du charisme.Il conduit les grandes grèves de la fin des années 70, en pleine dictature militaire (1964-1985). En 1980, il fonde le PT puis participe en 1983 à la création de la Centrale Unique des Travailleurs (CUT). C’est d’ailleurs dans un pays encore dans l’effervescence des grandes grèves de la fin du régime militaire que Lula lance, en 1988, la célèbre phrase : "Au Brésil quand un pauvre vole, il va en prison. Quand un riche vole, il devient ministre!". Un an plus tard il se présente pour la première fois à l’élection présidentielle et échoue de peu.

CRISTINA ZAPPA / AFP

Le 7 janvier 1989, Lula se rend à la Havane et y rencontre le président Fidel Castro, fidèle à la ligne du Parti des travailleurs.

Après deux nouveaux échecs aux élections présidentielles de 1994 et 1998, la quatrième tentative sera la bonne, en octobre 2002. Puis il est réélu en 2006.

MAURICIO LIMA / AFP

Le président du peuple. Lula est alors le premier président brésilien issu de la classe ouvrière. Fondateur du Parti des travailleurs (PT), Lula a initié le miracle socio-économique du géant émergent d'Amérique latine. Sous sa présidence, 40 millions de Brésiliens sont sortis de la misère pour grossir les rangs de la classe moyenne, grâce à d’ambitieux programmes sociaux en faveur des plus démunis.  

Le premier scandale. Mais l'icône de la gauche brésilienne et latino-américaine voit son image s’écorner peu à peu. Idéaliste mais pragmatique, il est passé maître dans l'art de tisser des alliances parfois contre-nature ou se débarrasser sans hésiter d'amis devenus gênants. En 2005, débute l'affaire "Mensalao" : la justice découvre que le PT a versé sous le premier mandat de l'ex-président Luiz Inacio Lula da Silva des pots-de-vins à des parlementaires pour qu'ils soutiennent les textes présentés par le gouvernement. Plusieurs très hauts dirigeants du parti sont condamnés à des peines de prison. Luis passe à travers les gouttes.

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Le couple Dilma-Lula. Puis en 2010, Lula quitte le pouvoir avec un taux de popularité exceptionnel de 80%, léguant un pays avec une croissance économique annuelle de 7,5%. Il a pu ainsi propulser au pouvoir sa dauphine Dilma Rousseff, qui a combattu dans les rangs de la guérilla et a été torturée sous la dictature militaire et inconnue du grand public. Ensuite, Lula n'a jamais cessé d'oeuvrer en coulisses, conseillant en permanence Dilma Rousseff pendant son premier mandat, malgré des désaccords croissants.

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L'affaire Petrobras . En mars 2014, un nouveau scandale éclate, d'une toute autre ampleur, avec les révélations sur un système généralisé de pots-de-vin versés depuis une dizaine d'années par les principales entreprises de BTP du Brésil à des responsables de la compagnie pétrolière étatique Petrobras en échange de contrats.

Une partie de ces pots-de-vin a été reversée au PT et aux membres de sa coalition hétéroclite. Dilma Rousseff elle-même a été longtemps à la tête du conseil d'administration de Petrobras mais n'avait été visée par aucune accusation directe dans ce dossier jusqu’en mars 2016. L'opposition réclame le déclenchement d'une procédure de destitution parlementaire de la présidente, accusant le gouvernement d'avoir maquillé les comptes publics en 2014 pour minimiser l'ampleur du marasme et favoriser sa réélection.

EVARISTO SA / AFP

Celui qui sauve sa peau. Six ans après avoir quitté le pouvoir, Lula n’est plus, aux yeux des Brésiliens, le président du peuple et des démunis. Il est désormais perçu comme un politique de plus qui a succombé à l’appel de la corruption et du pouvoir. L’ancien président qui a accepté un poste de quasi-Premier ministre pour tenter de sauver Dilma Rousseff et échapper à la menace d'un placement en détention passe désormais pour un lâche qui se dérobe.