"Pour la première fois, j'ai le sentiment qu'on nous écoute" : un Chilien victime d'abus sexuels de la part d'un prêtre s'est dit satisfait, samedi à New York, de son entrevue avec un envoyé spécial du pape chargé d'enquêter sur le cas d'un évêque chilien accusé d'avoir couvert ces abus.
Un entretien sous le signe de la "compassion". "Ce fut une longue entrevue, difficile sur le plan émotionnel", a déclaré ce témoin, Juan Carlos Cruz, à l'issue de sa rencontre avec l'émissaire du pape, Mgr Charles Scicluna. Cet archevêque maltais préside un conseil du Vatican chargé d'examiner les recours de prêtres soupçonnés de délits graves, comme les viols sur mineurs.
"Je suis très content d'avoir pu parler à Mgr Scicluna", lequel a fait preuve de "compassion" et d'"empathie", a ajouté Juan Carlos Cruz, dans une déclarations à des journalistes à l'issue de son audition, qui a duré une heure et demie. "Je lui ai raconté des situations que j'ai vécues ou que d'autres ont vécues, et il pleurait, sincèrement", a poursuivi le témoin, qui affirme avoir remis à l'émissaire du Vatican des documents venant à l'appui de ses accusations.
Chargé de dénouer le dossier Juan Barros. Après une étape à New York, Mgr Scicluna est attendu lundi au Chili, où il doit recueillir d'autres témoignages. Le prélat maltais est chargé de tirer au clair le cas de l'évêque chilien Juan Barros, nommé par le pape François en 2015 à la tête d'un diocèse alors qu'il était soupçonné d'avoir tu les agissements d'un vieux prêtre pédophile, Fernando Karadima. Cette affaire a empoisonné le récent voyage du souverain pontife dans ce pays (15 au 18 janvier).
Fernando Karadima, un ancien formateur charismatique de prêtres, a été reconnu coupable en 2011 par un tribunal du Vatican d'avoir commis des actes pédophiles dans les années 1980 et 1990. Il a été contraint de se retirer pour une vie de pénitence. Des victimes de Karadima ont accusé Mgr Barros d'avoir assisté à certains actes de pédophilie sans les dénoncer.
Un soutien trop appuyé. L'omniprésence de Mgr Barros aux messes publiques célébrées par le pape dans trois villes différentes du Chili avait soulevé un tollé dans l'opinion publique chilienne. "Le jour où vous m'apportez une preuve contre l'évêque Barros, je vous parlerai. Il n'y a pas une seule preuve contre lui. Tout est calomnie", avait lancé le pape, apostrophé par des journalistes au Chili, avant de donner une accolade publique au prélat controversé. Dans l'avion le ramenant à Rome, le pape avait dû présenter ses excuses aux victimes d'abus sexuels.