Un bon coup de pied dans la fourmilière. Voilà, en résumé, l'apport de Canal Jimmy dans la diffusion des séries télé en France. En 1990, Michel Thoulouze, le producteur des Nuls, lance Canal Jimmy, nouvelle antenne du groupe Canal+. Son concept ? La musique des années 70 et des séries.
À l'heure où les grandes chaînes programment Navarro et La petite maison dans la prairie, Canal Jimmy se tourne vers les fictions américaines dont les autres antennes ne veulent pas. Son premier fait d'armes s'appelle Dream On, une sitcom pour adultes. Si son nom ne vous dit rien, vous avez en revanche déjà aperçu le nom de ses créateurs : David Crane et Marta Kauffman.
Deux ans après Dream On, ces deux-là lancent leur nouvelle série. Une vague histoire de 6 amis new-yorkais qui habitent dans le même immeuble...
Friends en exclusivité et en VO. Cette série, c'est Friends. Au printemps 1996, Jimmy décroche la timbale et propose cette sitcom dont les autres chaînes n'ont pas voulu. Le succès est immédiat. "C'est le plus beau succès de Canal Jimmy", retient Alain Carrazé, spécialiste des séries, ancien animateur de la chaîne, joint par Europe 1. La France découvre Friends en version originale sous-titrée, à la fois par respect du produit original et pour des raisons économiques. Chaîne du câble, sans budget conséquent, Jimmy s'épargne ainsi le coût d'un doublage.
Le coup des Sopranos. Quand on demande à Alain Carrazé les plus beaux "coups" de Jimmy, celui-ci cite, outre Friends, des séries comme Profit, NYPD Blue, Dream On et Seinfield. Son meilleur souvenir : le jour où Annette Blicq, la responsable des acquisitions, a décroché Les Soprano… sans même avoir regardé la série ! "Elle l'a acheté en lisant le script. Rien n'avait été tourné. Les équipes de Jimmy avaient un flair incroyable", se souvient Carrazé.
Après Les Soprano, une des séries les plus récompensées de toute l'histoire de la télévision, Jimmy décroche Six Feet Under, l'histoire d'un propriétaire de pompes funèbres homosexuel, autre succès mondial. Jimmy se spécialise dans les séries décalées.
"Le Jimmy de l'époque aurait acheté Game of Thrones". De Jimmy, dont l'antenne s'arrête samedi, Alain Carrazé retient les années fastes, celles des années 1990. "Après, la chaîne s'est un peu perdue", juge-t-il. En cause : les chaînes généralistes qui ne boudaient plus les séries américaines, même les plus sombres, et bien sûr l'essor de la vidéo et d'internet.
Après avoir voulu s'orienter sur une thématique gay-friendly puis sur une programmation vintage, Jimmy rend aujourd'hui les armes, exsangue. "Jimmy a été un élément important dans l'histoire de l'audiovisuel des années 1990", salue son ancien animateur. Avec une certitude pour Alain Carrazé : si la série avait été créée dans les années 1990, le Canal Jimmy de l'âge d'or se serait rué sur Game of Thrones.