#OuiJeVote : la campagne contre l'abstention

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Fabienne Cosnay , modifié à
LE POINT DE VUE DE - Le politologue Arnaud Mercier analyse la campagne de communication du gouvernement pour les municipales.

"Voter, c'est tweeter en vrai". "Vous aimez liker ? Votez". A cinq semaines du premier tour des élections municipales, Jean-Marc Ayrault et le ministre de l'Intérieur Manuel Valls ont présenté lundi la campagne du gouvernement pour inciter les Français, notamment les jeunes, à aller voter, les 23 et 30 mars prochains. Intitulée #OuiJeVote, cette campagne comprend un gros volet web avec un site Internet et des déclinaisons sur Facebook, Twitter et Vine.

>>> Cette campagne de communication, en rupture avec ce qui se faisait jusqu'à présent, est-elle réussie ? Peut-elle vraiment inciter les jeunes à aller voter ? Éléments de réponse avec le politologue spécialiste des réseaux sociaux Arnaud Mercier.

Tu es jeune ? Cette campagne est pour toi. Le gouvernement redoute deux choses pour ses prochaines municipales : un taux d'abstention important chez les moins de 25 ans et une abstention élevée au sein de l'électorat de gauche. "Les moins de 25 ans sont les plus abstentionnistes", rappelle le politologue Arnaud Mercier. En 2008, par exemple, lors du premier tour des élections municipales, seuls 41,2 % des 18-24 ans s'étaient rendus aux urnes. Par ailleurs, le PS redoute une abstention élevée au sein de son électorat. "Il y a, chez une part non négligeable des électeurs de gauche des déçus de la politique François Hollande qui vont se livrer à un vote-sanction en choisissant l'arme de l'abstention", analyse le professeur de communication politique.

Une com' réussie. Des messages postés sur Facebook, Twitter et sur l’application de vidéos très en vogue Vine. Un hashtag #OuiJeVote qui ambitionne, dixit le gouvernement, de "fédérer une communauté de discussion autour du sujet". Un Premier ministre qui invite, via un tweet à découvrir le site ouijevote. Aucun doute pour Arnaud Mercier : cette campagne du gouvernement, résolument 2.0, répond bien à la cible visée : les moins de 30 ans. " Ce choix stratégique de communication, en rupture par rapport à ce qui se fait d'habitude, emprunte parfaitement aux codes de l'expressivité et aux moyens de communication des jeunes", estime le spécialiste des réseaux sociaux.

"Faire le buzz et faire parler". S'il reconnaît un côté réducteur dans les slogans "Vous aimez liker ? Votez" ou encore "Votez, c’est tweeter en vrai", Arnaud Mercier estime que le gouvernement, qui a investi 1,8 million d'euros dans cette campagne,  a plutôt bien réussi son coup. "Cela a un mérite, celui de faire du buzz et de faire parler. C'était l'objectif", souligne le spécialiste de communication politique.

"Faire parler et faire savoir". Sur le site ouijevote, on trouve aussi toutes les nouveautés de ces élections municipales. Dans des vidéos de 30 secondes, on explique aux internautes les nouvelles modalités de scrutin dans les communes de 1.000 à 3.500 habitants, l'obligation désormais d'avoir sa carte d'identité pour pouvoir glisser son bulletin dans l'urne ou encore la simplification des démarches pour voter par procuration. "Cela répond assez bien à une logique de publicité par viralité", décrypte Arnaud Mercier. "Comme ça fait parler, ça fait savoir", conclut le spécialiste en communication politique.

 

Faire savoir et inciter à aller voter ? Mais si voter était aussi simple que tweeter, ça se saurait. Si l'intention du gouvernement est louable, il y a peu de chances qu'elle soit suivie d'effets au niveau de la participation électorale. "Cette campagne fera parler mais ne fera pas voter", résume Arnaud Mercier. "Vous pouvez faire autant de com' que vous voulez, cela ne règle pas le problème de fond qui est le désintérêt des jeunes pour la politique", conclut le politologue. Comme le détaille la sociologue Anne Muxel dans son dernier livre, La politique au fil de l'âge, à tous les scrutins, sauf pour l’élection présidentielle, le taux de participation des jeunes aux élections est inférieur de dix points en moyenne par rapport au reste de l’électorat. Par ailleurs, chez la jeune génération, le droit de ne pas voter est tout autant revendiqué que celui de voter. "Le vote systématique ou le vote par devoir se sont effacés au profit d’un vote plus réflexif, plus individualisé, mais aussi plus aléatoire", souligne la chercheuse dans une interview à la Revue civique.