Sur un peu plus de 20 minutes d’interview, c’est le seul moment où il haussé le ton. Au micro Europe 1 mardi matin, Alain Juppé est revenu sur les "attaques franchement dégueulasses" dont il a fait l’objet "sur les réseaux sociaux" pendant la campagne de la primaire de droite. Mais quelles sont ces "calomnies" qui visent le maire de Bordeaux depuis plusieurs mois ?
- "Ali Juppé" et la désinformation autour de la mosquée de Bordeaux
La propagande anti-Juppé fonctionne à plein régime aussi bien sur Twitter que sur certains sites de la fachospère comme Riposte Laïque. Et rien de tel qu’un bon slogan pour qu’une campagne prenne sur le net. Un avatar islamique a carrément été dégoté au candidat de la primaire de la droite : "Ali Juppé". Le candidat de la primaire de droite y est présenté comme un complice des Frères musulmans et un chantre du communautarisme. Un slogan qui marche et quelques montages photos douteux. Et à ce petit jeu, certains internautes sont experts en la matière. On retrouve Alain Juppé avec une longue barbe ou portant une djellaba.
Il existe carrément deux comptes sous le nom d’Ali Juppé. Tous les deux faux, bien évidemment.
Comme toujours avec ces attaques anonymes qui circulent sur les réseaux sociaux, difficile d’en trouver le point de départ exact. Cependant, on peut remonter quelques pistes. La première mène au syndicat étudiant identitaire, "Assas Patriote". Le 24 février dernier, alors qu’Alain Juppé vient rencontrer les étudiants en droit de l’université parisienne, il est accueilli par une poignée d’élèves avec une banderole "Bienvenue Ali Juppé, grand mufti de Bordeaux". Ces patriotes lui reprochent notamment de vouloir "financer le retard culturel de l’Islam en France".
Ces identitaires s’appuient aussi sur une autre intox, la création d’une grande mosquée à Bordeaux. Comme l’expliquait le journal Sud Ouest en juin dernier, la fachosphère soupçonnerait Alain Juppé de vouloir construire une mosquée, proche des Frères musulmans, aux frais du contribuable bordelais.
#Juppe La base géante des Frères Musulmans à #Bordeaux dévoilée par un cabinet d'architecte http://t.co/DPNgh1TTiFpic.twitter.com/vfOfLsBVgy
— Observ islamisation (@islamisationfr) June 15, 2014
Le 12 juin, Alain Juppé coupe court à toutes ces folles rumeurs, sur le plateau de TF1. "On m'appelle Ali Juppé. On me qualifie de grand mufti de Bordeaux", explique-t-il ce jour-là. "On écrit partout que je suis en train de financer à prix d'or une immense mosquée à Bordeaux, qui n'existe pas et qui n'existera pas". Fin de la polémique ? C’est bien mal connaître la ténacité de certains internautes.
Lors du début du Ramadan, comme le relate Rue89 Bordeaux, un internaute du nom de Candide réussit à pénétrer le compte Twitter d’Alain Juppé pour publier un message à sa place : "Un très bon Ramadan à tous mes frères et sœurs en Islam. Que la paix d’Allah soit sur vous", peut-on lire sur le compte officiel du candidat à la primaire de la droite. Dans un premier temps, Alain Juppé choisit de porter plainte avant de se raviser.
- Sa proximité avec les Frères musulmans et l’imam Tareq Oubrou
Dans un billet publié sur Slate, le journaliste Claude Askolovitch explique aussi comment la fachosphère accuse fréquemment Alain Juppé d’être proche des Frères musulmans. A l’origine de ces accusations, un voyage en Egypte. En mars 2011, Alain Juppé est ministre des Affaires étrangères du gouvernement de François Fillon. Il se rend au Caire pour rencontrer "quelques jeunes acteurs de la Révolution égyptienne". Dans cette réunion, figurent quelques jeunes fréristes. Le raccourci est fait pour la fachospère, Alain Juppé soutient les Frères musulmans.
Autre reproche très souvent repéré sur les réseaux sociaux, la proximité d’Alain Juppé avec l’imam de Bordeaux, Tareq Oubrou. Pourtant considéré comme modéré, notamment sur la question du port du voile, il lui est reproché son appartenance à l’UOIF. Et comme Alain Juppé a remis la légion d’honneur à cet imam, le raccourci est vite pris.
- Des sarkozystes reprennent ces attaques
Mardi matin sur Europe 1, Alain Juppé s’en est pris aux autres candidats de la primaire de la droite. "Je n'ai entendu aucun de mes concurrents condamner ces attaques", s’est-il agacé. Peut-être l’ancien Premier ministre visait-il les sarkozystes. En effet sur Twitter, il n’est pas dur de trouver des comptes siglés #NS2017 ou #MerciNS qui accusent directement Alain Juppé sur la toile.
Présidentielle : Tareq Oubrou sera-t-il ministre d’Alain Juppé ? https://t.co/2aYQEyRWDh via @NS2017
— BUSSEAU #NS2017 (@michellebusseau) October 31, 2016
Oui oui,ça craint !! PAS#ALiJuppé pour de multitudes raisons.JAMAIS!
— F O V # MerciNS/SPF (@bng2617) November 7, 2016
TOUS pour ,@NicolasSarkozy#ToutPourLaFrance .
MOBILISONS NOUS!! https://t.co/bFhthSCX3E
Rappelons enfin qu’un candidat à la primaire est allé encore plus loin, reprenant carrément à son compte les attaques sur la "proximité d’Alain Juppé avec les Frères musulmans". Il s’agit de Jean-Frédéric Poisson, trois jours seulement avant le premier tour de la primaire.