Fin des régimes spéciaux de retraite, "grande loi de moralisation de la vie publique" contre le "népotisme", réforme de l'indemnisation chômage, système de bonus malus pour les CDD... Emmanuel Macron, accusé d'être trop vague dans ses propositions, abat jeudi les cartes sur son programme pour tenter de faire taire les critiques. Désormais favori pour l'emporter selon les sondages, le candidat d'En Marche ! a présenté en milieu de matinée un document d'une trentaine de pages qui s'articule autour d'une "dizaine de grands thèmes, déclinés en de très nombreuses mesures", dont un grand plan d'investissement de 50 milliards d'euros, en partie consacré à la formation et à la transition écologique. Emmanuel Macron avait déjà dévoilé une série de mesures au Parisien.
- Une moralisation de la vie publique
Emmanuel Macron prévoit l'interdiction pour les parlementaires d'exercer des activités de conseil, la fiscalisation de l'intégralité de la rémunération des parlementaires, notamment l'IRFM (indemnité représentative de frais de mandat), la fin du régime spécial de retraite des parlementaires mais aussi l'interdiction pour les parlementaires d'employer des proches ou des membres de leur famille. Le candidat souhaite également interdire le cumule de plus de trois mandats identiques successifs et empêcher les détenteurs d'un casier judiciaire de niveau B2 de se présenter à une élection.
- Un système universel de retraite
Emmanuel Macron souhaite surtout la création d'un système universel de retraite. "Les règles seront les mêmes pour tous les régimes [de retraites]. Ce sera la vraie fin des inégalités entre fonctionnaires et salariés du privé", martèle le candidat. Promettant de ne pas modifier l'âge de départ à la retraite et de ne pas baisser le niveau des pensions "durant le quinquennat", Emmanuel Macron souhaite, s'il est élu en mai, "engager dès le début, avec les partenaires sociaux les négociations" sur ce sujet.
- 35 heures assouplies et bonus malus pour les CDD
Dans son programme, le candidat d'En Marche mentionne également une organisation "de la vie économique et sociale au niveau de la branche et de l'entreprise". Les 35 heures pourront ainsi être assouplies par des "accords négociés majoritaires". Un bonus/malus pour les entreprises abusant des CDD courts sera instauré.
La création d'un système universel d'assurance-chômage financé par l'impôt et piloté par l'Etat, ouvert aux entrepreneurs, aux agriculteurs, aux indépendants, aux professions libérales, ainsi qu'aux salariés qui démissionnent, dans la limite d'une fois tous les cinq ans est aussi au programme. Dans ce cadre, interviendra la suppression de la part salariale des cotisations chômage, en plus de la cotisation maladie, grâce à une hausse de la CSG d'1,7 point. La prime d'activité devrait en outre augmenter de 50%.
Une pérennisation du CICE (Crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi) sous forme d'allègement de charges pérenne est aussi avancé. Au programme également, une baisse de l'impôt sur les sociétés de 33,3 à 25% pour rejoindre la moyenne européenne, ainsi que la transformation de l'ISF en "Impôt sur la fortune immobilière" (le patrimoine financier et en actions ne sera plus assujetti).
- Une suspension des allocations chômages si...
Pour les demandeurs d'emploi, une suspension du versement des allocations chômage interviendra après le refus de plus de deux offres d'emploi "décent", pour un salaire qui "n'est pas inférieur de plus de 20-25%" à l'ancien poste. Des aides à la mobilité seront mises en place pour les chômeurs, il prévoit d'investir 15 milliards pour la formation de ces derniers et des jeunes sans qualification.
- De la discrimination positive pour les banlieues
Le programme présenté jeudi prévoit également une prime de 15.000 euros pour les embauches en CDI des habitants des 200 quartiers prioritaires de la politique de la ville, une mesure de "discrimination positive assumée" par l'entourage du candidat. "Quel que soit le lieu où elle se situe, une entreprise qui recrutera en CDI un habitant de l'un de ces quartiers bénéficiera d'une prime de 15.000 euros sur 3 ans : c'est comme si elle ne payait plus de charges", est-il expliqué dans le document compilant les principales mesures d'Emmanuel Macron, distribué jeudi à la presse.
Le programme prévoit également des mesures anti-discrimination, avec un recours au "testing". Le candidat prévoit des "opérations de contrôle aléatoires et imprévues à grande échelle, en matière d'accès à l'emploi ou au logement". En matière d'égalité hommes-femmes, les entreprises qui ne respecteraient pas l'égalité salariale verront leurs noms publiés sur Internet.
- Une exonération de la taxe d'habitation
Une exonération en trois ans de la taxe d'habitation pour 80% des foyers, pour un coût global de 10 milliards d'euros, est inscrite au programme du candidat d'En Marche! Une revalorisation de 100 euros par mois de l'allocation adulte handicapé et du minimum vieillesse également.
- 15 milliards d'euros pour la transition écologique
Emmanuel Macron prévoit d'attribuer 15 milliards d'euros du plan d'investissement à la transition écologique. Il souhaite également une réduction de moitié du nombre de jours de pic de pollution atmosphérique, grâce au remplacement des véhicules anciens via la création d'une prime de 1.000 euros pour l'achat d'un véhicule moins polluant, neuf ou d'occasion. Un million de logements mal isolés devraient être rénovés. D'ici 2022, 50% des aliments des cantines scolaires ou d'entreprises devront être bio, écologiques ou issus des circuits courts. Enfin, Emmanuel Macron souhaite une réduction à 50% de "la part du nucléaire dans (la) production d'énergie".
- Une plan pour les zones d'éducation prioritaire
Le candidat à la présidentielle veut une autonomie pour les écoles "en termes de recrutement" au niveau pédagogique. Une prime de 3.000 euros nets par an pour les enseignants en zone prioritaire Rep+ sera ainsi versée. Dans ces zones, Emmanuel Macron souhaite une division par deux du nombre d'élèves en CP-CE1 pour qu'il n'y ait pas plus de 12 élèves par enseignant, avec notamment la création de 4.000 à 5.000 postes d'enseignants. Un rétablissement des classes bi-langues ainsi que des études dirigées "partout", en mobilisant "les enseignants, des retraités volontaires et des étudiants" sont prévus. "Dans le parcours de tous les étudiants de France, il y aura ainsi un trimestre dédié à cette activité", insiste le candidat. Pour une amélioration des résultats scolaires, Emmanuel Macron souhaite interdire l'usage des téléphones portables dans l'enceinte des collèges et des écoles primaires.
- 10.000 postes de police supplémentaires
Pour une sécurité renforcée, le candidat d'En Marche! souhaite la création d'une "police de sécurité quotidienne" ainsi que deux nouvelles écoles de police. L'une de 1.000 places, l'autre de 500, pour la formation initiale et continue des agents. Devrait suivre la création de 10.000 postes de policiers et gendarmes ainsi que la recréation d'un vrai renseignement territorial. Emmanuel Macron souhaite également la création d'un état-major centralisé du renseignement, rapportant directement au Conseil de défense auprès du président de la République. Pour les "foreing fighters", (les djihadistes français de retour de Syrie ou Irak, ndlr), la création de centres pénitentiaires ad hoc devraient intervenir.
- Création d'un fond européen de défense
Pour un renforcement de la coopération européenne en matière de sécurité, le candidat souhaite la création de 5.000 postes de policiers aux frontières au niveau de l'UE. Sur le plan de la Défense, Emmanuel Macron réclame la création d'un Fonds européen de défense qui financera les équipements militaires communs et d'un Quartier général européen permanent. Il veut également la mise en place d'un budget de la zone euro avec un Parlement et un ministre de l'Economie et des Finances de la zone euro. Sur un plan plus économique, Emmanuel Macron propose enfin de limiter à un an la durée autorisée de séjour d'un travailleur détaché et d'imposer les grands groupes internet sur leur chiffre d'affaires réalisé en France.