Sceptique sur les remèdes, le Sénat s'attelle au projet de loi Santé

Les sénateurs vont à leur tour étudier le projet de loi Santé, et ses 700 amendements, à partir de lundi.
Les sénateurs vont à leur tour étudier le projet de loi Santé, et ses 700 amendements, à partir de lundi. © STÉPHANE DE SAKUTIN / AFP
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avec AFP
Après son passage à l'Assemblée nationale, le projet de loi Santé va être examiné au Sénat à partir de lundi. Il prévoit notamment des propositions pour lutter contre les déserts médicaux, une transformation numérique et une labellisation de 500 à 600 "hôpitaux de proximité".

Fin du "numerus clausus" pour les étudiants en médecine, hôpitaux de proximité, transformation numérique : le Sénat s'attaque lundi, après l'Assemblée nationale, à l'examen du projet de loi Santé, en étant sceptique quant à sa capacité à transformer un système "à bout de souffle".

Les sénateurs auront toute la semaine pour ausculter le projet de loi relatif à "l'organisation et à la transformation du système de santé" et ses quelque 700 amendements, avant un vote solennel à l'issue de cette première lecture mardi 11 juin. Le gouvernement vise une adoption définitive avant fin juillet.

Des réformes des études de médecine et des données de santé

Traduisant une partie des mesures du plan "Ma Santé 2022" présenté en septembre par Emmanuel Macron, le texte porté par Agnès Buzyn prévoit une réforme des études de santé pour notamment pallier le manque de médecins, la labellisation de 500 à 600 "hôpitaux de proximité", une régularisation de médecins étrangers et encore un accès élargi aux données de santé ou la création d'un espace numérique de santé.

 

Un texte déjà critiqué car soumis à des ordonnances

Les sénateurs sont quasi unanimes à regretter que le texte renvoie "largement" à des ordonnances ou décrets ultérieurs, y compris "sur des sujets essentiels". Pour la ministre de la Santé, c'est "un choix assumé", le gouvernement voulant "disposer de temps pour la concertation" avec le secteur. Agnès Buzyn a cependant indiqué qu'elle présenterait un amendement "transcrivant dans le projet de loi les missions des hôpitaux de proximité", qui devaient initialement être définies par des ordonnances. Les sénateurs ont déjà adopté le projet de loi en commission moyennant des modifications, mais sans remettre en cause ses grands axes.

Un projet de loi jugé "insuffisant"

Le président de la commission des Affaires sociales Alain Milon (LR) a jugé qu'il s'agit d'une "loi d'ajustement", plutôt que d'un texte "structurant". Et il "ne pourra pas être appliqué complètement parce que le gouvernement n'a pas mis les financements suffisants en face", a-t-il regretté.

"On ne dit pas que cette loi est mauvaise", a déclaré pour sa part Hervé Maurey (centriste), président de la commission de l'Aménagement du territoire. "On dit qu'elle est insuffisante. On se bat avec un petit lance-pierres là où il faudrait une mitrailleuse".

Le jugement est plus sévère au groupe CRCE à majorité communiste. Il s'oppose à un projet de loi "qui ne va malheureusement pas améliorer notre système de santé". "On est face à une situation où il y a une perte de dignité chez les soignants comme chez les patients", s'alarme Cathy Apourceau-Poly.

Les déserts médicaux au centre des débats

La problématique de la désertification médicale devrait être largement débattue dans la chambre des territoires, les sénateurs étant partagés. La mesure phare du texte - la suppression du "numerus clausus" qui limite le nombre d'étudiants admis en deuxième année de médecine - sera effective à la rentrée 2020, avec l'objectif d'augmenter d'environ 20% le nombre de médecins formés. Mais les effets ne se feront sentir que dans une décennie. 

 

En attendant, le gouvernement se refuse à toute remise en cause de la libertés d'installation des futurs médecins dans certains territoires. Les sénateurs de tous bords proposeront toute une panoplie de remèdes allant de mesures incitatives à la régulation "douce". En commission, les sénateurs ont "enrichi" le volet numérique du texte, adoptant plusieurs amendements pour accélérer la généralisation du dossier médical partagé et de l'espace numérique de santé.