Comment évolue le marché de la drogue en Europe ? L'Observatoire européen des drogues et des toxicomanies (OEDT), qui publie jeudi son rapport annuel sur les consommations et les trafics sur le continent européen, s'inquiète en 2015 de l'augmentation de la pureté et de la concentration dans les produits, qui peuvent avoir de graves conséquences sur la santé des utilisateurs.
Entre 2006 et 2013, l'OEDT a constaté une "hausse sensible de la teneur et de la pureté des drogues illicites les plus couramment utilisées en Europe". C'est le cas notamment pour le cannabis, la cocaïne et l'ecstasy. Par ailleurs, note l'OEDT, "la pureté de l'héroïne a également augmenté en 2013", même si le nombre de délits liés à la consommation de cette drogue a considérablement baissé en sept ans (ce qui pourrait s'expliquer par une diminution globale de sa consommation).
Le marketing de la pureté. L'OEDT explique ce changement dans la qualité des drogues par deux facteurs : l'innovation technique et la concurrence sur le marché. En somme, les laboratoires de drogues de synthèse sont mieux équipés pour fabriquer des drogues plus puissantes et les trafiquants, pour attirer les clients vers eux, leur propose un produit jugé de meilleure qualité. Pour preuve, note l'organisme, des dealers travaillent sur le marketing de ces produits plus forts. "Des comprimés [de MDMA, le principe actif de l'ecstasy] fortement dosés aux formes et logos particuliers apparaissent, probablement avec [un] objectif de commercialisation", indique l'Observatoire dans son rapport.
Des usagers pas toujours avertis. Ces évolutions inquiètent particulièrement l'OEDT, car les usagers n'ont pas toujours conscience de prendre des drogues plus puissantes et n'adaptent donc pas leur mode de consommation. "Au cours de l'année écoulée, [l'OEDT] et Europol ont lancé des alertes de santé publique sur les risques de la consommation de tels produits", écrit l'Observatoire. Par ailleurs, ajoute-t-il, " des alertes ont également été émises en ce qui concerne les comprimés vendus comme ecstasy mais contenant d’autres substances nocives, telles que le PMMA, suite à une série de décès".
Dans le reste du rapport, l'OEDT évoque également la difficulté à apporter une réponse appropriée au développement du trafic de drogue sur internet ainsi qu'aux nouvelles drogues. En 2014, l'Union européenne a découvert toutes les semaines deux produits inconnus jusque-là.
Les "salles de shoot" n'augmentent pas la consommation
Les "salles de shoot", déjà présentes dans plusieurs pays, n'ont pas augmenté la consommation de drogue ni entraîné une hausse de la criminalité locale liée au trafic de drogue, indique aussi l'Observatoire européen des drogues et des toxicomanies. L'OEDT a rassemblé les résultats d'études menées sur les quelque 90 salles d'injection sous supervision médicale qui existent dans le monde.
"Il n'y a pas de preuve que l'accès à ces salles de consommation de drogue augmente l'usage de drogue ou la fréquence des injections de drogue", souligne l'OEDT. Parmi les "bénéfices" de ces salles, l'observatoire européen souligne une amélioration "en terme d'hygiène et de sécurité", notamment chez les clients réguliers de ces salles, un accès accru de ces populations aux structures de soin, "une baisse de la consommation de drogue dans la rue et des nuisances qui y sont associées".
A Paris, Bordeaux et Strasbourg, des expérimentations de "salles de shoot" devraient démarrer dans les prochains mois.