Les petits garçons dont les mères ont été exposées à des perturbateurs endocriniens ont trois fois plus de risques de développer un hypospadias, une malformation génitale. Une étude parue le 23 mai 2015 dans la revue spécialisée European Urology démontre "pour la première fois que l'exposition professionnelle, habitationnelle ou domestique, et a fortiori leur association, augmente fortement le risque de malformation génitale", assure le Pr Sultan, un des deux chercheurs à l’origine de l’étude. "Longtemps, il y a eu des données contradictoires entre causes génétiques et causes environnementales", continue-t-il.
Le travail et le lieu d’habitation. Les deux professeurs du CHU de Montpellier, Nicolas Kalfa et Charles Sultan, pointent du doigt les solvants, détergents et pesticides qui peuvent être utilisés aussi bien à la maison qu’au travail par les deux parents. Ils ont d’ailleurs dressé une liste des professions les plus exposées. Les agents d’entretien, puis les coiffeuses, les esthéticiennes et les femmes travaillant dans des laboratoires sont des populations à risque chez le sexe féminin. Chez les hommes, les agriculteurs, les personnes travaillant en laboratoire, les agents d’entretien et les employés de mécanique et en peinture.
Le lieu d’habitation joue aussi un rôle important. "La présence d'une usine d'incinération, d'une décharge, d'une usine chimique ou de culture intensive dans un rayon de 3 km autour du lieu d'habitation est plus fréquente dans le cas d'enfants hypospades", précise le Pr Sultan.
600 garçons suivis. L’étude du chirurgien pédiatrique Nicolas Kalfa et de l’endocrinologue pédiatrique Charles Sultan du CHU de Montpellier a porté sur 600 enfants, suivis pendant cinq ans dans les hôpitaux de Marseille, Bordeaux, Nice et Montpellier. La moitié des petits garçons suivis étaient atteints d’hypospadias, une maladie qui engendre un positionnement anormal de l’orifice de l’urètre. Cette malformation congénitale, qui peut engendrer des troubles de la fertilité à l’âge adulte, concerne trois enfants sur 1.000 et peut être traitée chirurgicalement.
Une autre étude à venir sur la puberté précoce. Le Pr. Sultan s'apprête également à faire une étude sur la puberté précoce chez les filles, "un phénomène inquiétant" et "de plus en plus important dans le sud de la France" avec pour cause aussi la pollution de l'environnement, notamment les pesticides. "68 % des petites filles qui ont connu une puberté très jeune vivent dans un environnement à risque", remarque-t-il, soulignant par ailleurs que la pollution entraîne chez le garçon "un problème de micro pénis et l'apparition de glandes mammaires à la puberté".
"Jamais dans mon service il n'y a eu autant de garçons avec des micros pénis", se désole le médecin, appelant "au respect du Grenelle de l'environnement" et à "l'arrêt urgent de l'utilisation des pesticides" alors qu'ils ont augmenté "de 11 % en 2014".